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Plus de 10% des arrêts de travail sont injustifiés ![version 1.14 du 17/09//2009][version 1.12 du 10/07//2009]

mercredi 17 juin 2009, par omedoc

Cette affirmation qui s’est retrouvée récemment à la une est totalement fausse. Il y a moins de 1% d’arrêts de travail "injustifiés", et depuis que la sécu existe... [1]

Cependant le fait vécu par julien Bezolles doit nous amener à mettre fortement en doute ces statistiques...

Voilà un exemple d ?article de journaliste qui ne fait pas son travail (absence d ?esprit critique), où plutôt, peut-être, qui le fait trop bien ?

Les questions que le journaliste aurait dû se poser sont :

 Est-ce que lorsque le médecin conseil donne un avis défavorable, c’est parce qu’il considère que l’arrêt de travail est "injustifié" ?
 Et dans ce cas : qu’est-ce qu’un arrêt injustifié et/ou abusif ?
 Les médecins conseils donnent-ils un avis sur tous les arrêts de travail ?
 Parle-t-on du nombre des arrêts où du coût des arrêts ?

Il est à noter que :

  • Le médecin conseil contrôle la prescription du médecin (c’est à dire le médecin (d’où d’ailleurs la procédure de mise sous entent préalable) et non le travailleur malade. [2]
  • Le rôle du médecin conseil est d’abord et avant tout le maintien dans l’emploi
  • Le médecin conseil ne connaît pas le travail et le poste de travail du malade. Seul le médecin du travail pourrait prescrire et justifier un arrêt de travail en toute connaissance de cause et d’effet...
  • Il faut distinguer : arrêt de travail injustifié, abusif et frauduleux....
    • L ?arrêt de travail n ?est plus justifié lorsque la personne redevient apte à son poste, ou au contraire inapte définitif, avec comme conséquence le reclassement professionnel ou l ?invalidité.
    • L’arrêt de travail est frauduleux lorsque la personne se fait prescrire un arrêt de travail alors qu’elle sait consciemment qu’elle pourrait travailler. En général le but est de pouvoir avoir une autre activité : compétition sportive par exemple.
    • L’abus est plus difficile à définir. Voir mon article sur ce sujet.

Analyse de l’article

Assurance-Maladie
EXCLUSIF Plus de 10% des arrêts de travail sont injustifiés
La Tribune.fr - 09/06/2009 Ã 10:44

Les articles "scandaleux" flattent ce qui a de plus malsain chez les êtres humains.

A noter que c’est le terme "injustifié" qui est employé et non "abusif". Pas la peine de préciser : tout le monde en lisant l’article comprendra ce qu’il faut entendre c’est à dire : "abusif". D’où les appels à la délation dans les commentaires [3], d’où la réaction du gouvernement qui ne parle que de contrôler encore plus...

La Tribune révèle ce mardi matin que 1,5 million de contrôles ont été réalisés l’an dernier. Près de 170.000 des arrêts de travail ont reçu un avis défavorable des médecins de la Sécurité sociale.

O ! la révélation ? Il s’agit en fait de la même "révélation tous les ans depuis 30 ans ! [4]

Voir ces courbes :

Où on s’aperçoit que le coût augmente depuis 2006, soit depuis l’intensification des contrôles !

170 000 divisé par 1,5 millions donne les 11% annoncés.
Quel est le dénominateur ? c ?est le nombre d ?arrêts de travail contrôlés. Or :

  • tous les arrêts de travail ne sont pas contrôlés, tous ne donnent pas lieu à avis :
    • En particulier tous les arrêts de très courte durée (41% des arrêts sont inférieurs à 8 jours) [5]
    • Et la plus grande partie des arrêts entre 8 jours et moins de 45 jours. (Il n ?y a que 20% des arrêts qui vont au-delà de un mois.) [6] Quel est la proportion d ?arrêts contrôlés et non contrôlés ?
  • En accident du travail on ne donne qu ?exceptionnellement un avis sur l ?arrêt de travail : on consolide à la place ?.Les chiffres correspondent ils aux arrêts maladie ? maladie et accident du travail ?|L’absence de précision est significative d’un manque de rigueur, et d’une méconnaissance du terrain]]

Il faudrait donc connaître le nombre de travailleurs qui ont eu un arrêt de travail en 2008. [7] : « En 2005, un peu plus de 20%de la population active assurée au régime général bénéficient d ?un arrêt de travail pour maladie. » [8] Quel est le nombre de population active ?

Quel est le numérateur ?

  • certains avis défavorables sont en fait des avis favorables en vue de la mise en invalidité. Sont-ils comptabilisés ?
  • On peut contrôler plusieurs fois la même personne dans l ?année, avec un avis défavorable après une suite d ?avis favorable. Comment est-il compté ?

Alors que les indemnités journalières (IJ) prises en charge par la Sécurité sociale pour les arrêts de travail sont en hausse constante - au premier trimestre 2009, les versements d ?IJ ont bondi de 6,4% -, la Caisse nationale d ?assurance-maladie (Cnam) vient de faire un bilan de ses opérations
de contrôles en 2008.

Pourquoi ne pas donner la source de l ?info sur internet ?

Il est à noter que si le montant des IJ augmentent depuis plusieurs mois, leur nombre diminue lentement depuis plusieurs mois : c’est donc le coût moyen d’une indemnité journalière qui augmente.

Il en ressort que la progression rapide des arrêts de travail, inhabituelle en période, de chômage et de chute de la masse salariale, ne s ?explique pas par un relâchement de la politique de contrôle des médecins-conseils de la Sécurité sociale.

Ceci confirme l ?inefficacité des contrôles ?.

L ?an dernier, l ?assurance-maladie a réalisé plus de 285.000 contrôles pour les salariés en arrêts de courte durée, de moins de quarante cinq jours, en ciblant les arrêts répétés (par exemple, au moins trois arrêts de moins de quinze jours sur un an), certaines pathologies comme les lombalgies ou les temps partiels thérapeutiques.

Il se confirme que pour les arrêts courte durée, le dénominateur (du pourcentage de 13%) ne correspond absolument pas à tous les arrêts de travail, mais à certaines pathologies. Le dénominateur est en fait beaucoup plus important...

Sur ce total, les médecins-conseils ont estimé que dans environ 13% des cas, l ?arrêt était injustifié ou trop long. Soit quelque 37.000 avis médicaux défavorables, à la suite desquels les salariés ont dû, théoriquement, reprendre leur activité, les indemnités journalières étant alors suspendues.

Faux, les 37000 avis médicaux défavorables ne signifient que rarement que l ?arrêt de travail est trop long ou injustifié pour les raisons exposées par Julien Bezolles
et Christian Lehmann.

Depuis août 2007, la Cnam a, par ailleurs, engagé des contrôles exhaustifs pour les arrêts de travail longs de plus de quarante-cinq jours, essentiellement responsables de la hausse rapide de la courbe des IJ en 2008.

Nous avons vu que ce contrôle exhaustif porte sur une minorité d ?arrêts (même s ?ils sont les plus coûteux)

Les médecins de la Sécurité sociale ont donc réalisé, l ?an dernier, près de 1,2 million de contrôles, dont environ 11% ont donné lieu à un avis défavorable - ce qui signifie que quelque 130.000 arrêts longs étaient inadaptés ou injustifiés.

Cela n ?a absolument pas cette signification. [9] [10]
 Ils s ?agit d ?arrêts de longue durée qui ont été justifié par le médecin conseil à plusieurs reprises avant qu ?une fin de repos soit donnée.
 Par ailleurs cette fin de repos peut déboucher sur une invalidité. Est-ce que cette possibilité a été prise en compte ?
 Et surtout cette fin de repos débouche en général sur une inaptitude au travail avec perte d ?emploi et recherche d ?un autre travail ? Peut-on dire pour autant que l ?arrêt n ?était pas justifié !!! Combien de fin de repos ont débouchés sur une inaptitude ?
 Enfin il y a beaucoup de travailleurs réellement malades au départ (cancers, hernie discale opérée...), qui somatisent et/ou dont la maladie se chronicise. Ils ont peur de reprendre le travail, de ne pas pouvoir tenir, de se reblesser. Un avis défavorable à la poursuite de l’arrêt de travail permet parfois de provoquer un changement. Il ne s’agit absolument pas de personnes qui "profitent du système" pour cultiver son champ, construire sa maison, où faire la fête [11]

Pour contenir l ?évolution de ces arrêts de longue durée, l ?assurance-maladie cherche à prévenir les risques de désinsertion professionnelle. Elle recommande au médecin conseil d ?indiquer la possibilité d ?une reprise d ?un travail léger ou à temps partiel lorsque cela est possible, si besoin au médecin qui suit le patient ; ou de prévenir en amont l ?entreprise, avec l ?accord de l ?assuré, si ce dernier n ?est plus en mesure de reprendre le poste occupé précédemment.

Oui ! cela passe avant le contrôle. Quel en est le résultat ? Quels sont les chiffres ! Nous attendons un article de la tribune sur ce sujet...

Ces contrôles plus fréquents avaient largement expliqué le mouvement de reflux des arrêts de travail entre 2004 et 2006.

Ceci reste à démontrer (voir autre article sur mon site)

Aujourd ?hui, ils ne sont plus suffisants pour inverser la tendance. Alors que le gouvernement s ?en inquiète, l ?assurance-maladie devrait proposer rapidement de nouvelles mesures pour freiner les dépenses d ?indemnités journalières. Véronique Chocron

Probablement encore plus de contrôle ou une maîtrise comptable à voir les réactions gouvernementales. Voir mes solutions. Il faut une action [12] sur tous le monde : prescripteur (FMC), patient (information), employeur (Information sur les dégâts de certains types de management, prévention de la souffrance au travail), et réorganiser le système...


[1Cette affirmation semble contre intuitive. : voir mon article : Quelle est la fréquence des arrêts de travail abusifs ?. Attention, il faut distinguer : arrêt de travail injustifié, abusif et frauduleux....

[2D’ailleurs certains ne se privent pas d’imputer les abus aux médecins plutôt qu’aux malades

[3Article équivalent de Libé

[4Voir par exemple ici en 2007 et ici en 2008 d’autres article du même type...

[6cf supra

[7Pour être précis il faudrait définir ce qu ?on appelle un arrêt de travail. En effet, un arrêt de travail peut être en plusieurs morceaux, il s ?agit de la même pathologie mais la personne fait des tentatives de reprise. On peut avoir aussi pour la même personne plusieurs arrêts pour des pathologies différentes

[8cf repère N°5

[9source : étude personnelle

[10Ici nous sommes dans le cas des 4% d’arrêts supérieurs à 6 mois (source = point de repère N°5)

[11quoique même dans ce dernier cas, il n’est pas certain que l’on puisse dire que l’arrêt est abusif. En effet j’ai connu un travailleur qui s’est arrêté 6 mois suite à un conflit au travail, qui a fait la fête pendant tout son arrêt de travail et qui s’est suicidé au moment de la reprise (spontanée) du travail...

[12Pas seulement pour un problème de coût : voir cet article.