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Essai sur l’intelligence et la bêtise [En cours de réécriture]

vendredi 15 avril 2016, par omedoc

1° IMPORTANCE DU SUJET : La bêtise est source de beaucoup de souffrances, or elle est peu étudiée.

2° SA PROPRE BÊTISE : On reconnaît la bêtise chez les autres. On ne la reconnaît pas chez soi-même.

3° COMMENT LUTTER CONTRE SA PROPRE BÊTISE : Repérer la bêtise chez les autres pour prévenir ou soigner la notre, et non pour se croire plus intelligent.

4° REPÉRER L’INTELLIGENCE CHEZ LES AUTRES : On ne fait pas suffisamment attention à l’intelligence chez les autres.

IMPORTANCE DU SUJET : La bêtise est source de beaucoup de souffrances, or elle est peu étudiée.

La bêtise règne sur internet dans les forums de discussion et les commentaires de certains sites.
La bêtise est manifeste dans les décisions des politiques.
La bêtise est dans nos actes, nos opinions, nos croyances.

Et pourtant, relativement peu d’analyses par rapport à l’importance du sujet

SA PROPRE BÊTISE : On reconnaît la bêtise chez les autres. On ne la reconnaît pas chez soi-même.

Cette cécité par rapport à sa propre bêtise fait partie de la bêtise. Prendre conscience de sa bêtise c’est justement faire preuve d’intelligence.

COMMENT LUTTER CONTRE SA PROPRE BÊTISE : Repérer la bêtise chez les autres pour prévenir ou soigner la notre, et non pour se croire plus intelligent.

Nous avons tous notre dose de bêtise, or, la bêtise est source de souffrance pour soi-même et pour les autres.
Comment se soigne-t-on ?
 En exerçant son esprit critique et autocritique.
 En repérant la bêtise, mais aussi l’intelligence chez les autres

REPÉRER L’INTELLIGENCE CHEZ LES AUTRES : On ne fait pas suffisamment attention à l’intelligence de l’autre.

Liens :
https://blogs.mediapart.fr/rolandberthou/blog/241116/comment-les-entreprises-encouragent-la-betise-collective
http://la-bas.org/la-bas-magazine/textes-a-l-appui/donald-trump-est-le-visage-de-notre-idiotie-collective

Sources ici

Qu’est-ce que l’intelligence ?

L’intelligence, ce n’est pas prouver que A => B [1] — ce que peut faire une machine souvent mieux qu’un cerveau — c’est "deviner le A qui permet de démontrer le B".
"Et la "prémisse" A peut-être n’importe quoi", et il faut parfois "sortir du cadre".
Autre exemple : si on nous demande d’éditionner les nombres de 1 à 9 on peut "bêtement" les additionner, on peut aussi sortir du cadre et remarquer que 0+9 = 9 ; 1+8 = 9 ; 2+7 = 9...

Une machine ne pourra jamais être intelligente au sens où elle ne pourra jamais imaginer une loi telle que E=mC² ou que, pour démontrer que les réels ne sont pas dénombrables, il faut utiliser l’argument diagonal.

" [Il est permis de se moquer de H Simon,] celui qui a fait retrouver la troisième loi de Kepler (les carrés et les cubes) par une machine, oubliant que ce n’est pas la loi qui lie la période au demi-grand axe, mais l’idée même d’une telle loi qui est difficile à trouver. Surtout quand on est... astrologue comme Kepler." [2]

L’intelligence artificielle telle que décrite dans l’article de la revue Science et pseudo-sciences de janvier 2016 [3] permet, mieux que le cerveau humain, de déduire B de A, et donc de gagner aux échecs ou au jeu de Go. Mais comment fait le cerveau humain pour trouver A ? Pour le moment c’est un mystère.

Voici ce que dit JY GIRARD de l’intelligence artificielle [4] [5] :

"C’est avant tout une question de nuances. Si l’on entend par là qu’on peut mécaniser l’activité de certaines zones du cerveau, par exemple automatiser la reconnaissance de l’espace et fabriquer des robots qui retombent sur leurs pattes, tout comme des chats, ou qui corrigent les déviations de trajectoire d’un véhicule au conducteur somnolent... bien sûr. Mais doit-on parler d’intelligence, ou plutôt d’instinct ? L’« instinct artificiel », cela marche sans problème.
Si l’on veut vraiment de l’intelligence, de la créativité, c’est plus complexe et franchement voué à l’échec. Le théorème de Gödel s’y oppose, mais, plus en réfutant la métaphore totalitaire d’une science mécanisable et finale, que dans les détails. Pour les détails utilisons le bon sens. Ce qui fait l’intelligence au sens créatif, c’est qu’on ne l’attend pas, qu’elle se place en position d’inconfort, c’est donc un certain « grain de folie », déjà mentionné supra, dont la condition sine qua non est la possibilité d’erreurs, le droit à l’erreur. L’intelligence suit des chemins déviants , inattendus, y compris ceux du préjugé, de l’ambition, de la colère, les sept péchés capitaux et même pire."

L’intelligence c’est donc d’abord savoir sortir du "cadre" (ou du logiciel) que l’on s’est donné ou que l’on nous a donné (voir ANNEXE III), et avoir suffisamment d’imagination [6].

Illustration : la "guerre contre les drogues".

André Comte-Sponville définit ainsi l’intelligence dans son dictionnaire philosophique : "L’intelligence est la capacité plus ou moins grande, de résoudre un problème, autrement dit de comprendre le complexe ou le nouveau.". Qu’est-ce que comprendre ?. Comprendre ne suffit pas pour résoudre le problème.

Questions sur la bêtise.

Il faut distinguer "être bête" ( sens 1) et agir, décider, raisonner... bêtement (sens 2). Même si non précisé par la suite il s’agit surtout d’étudier la bêtise au sens 2.

Pourquoi peut-on être intelligent sur certains domaines et bête sur d’autres. Existe-t-il une différence entre "être intelligent" et dire des choses intelligentes ou agir intelligemment ?

Pourquoi la bêtise de l’autre énerve plus que la sienne ?

Pourquoi reconnaît-on plus la bêtise de l’autre que la sienne propre ?

Quel rapport entre la bêtise, la méchanceté ?

Comment éviter de raisonner ou agir bêtement ?

Qu’est-ce que la bêtise ?

Comment la définir ?
Il serait bête de croire avoir trouvé la bonne/vraie définition, c’est à dire celle qui permette d’étiqueter avec certitude les personnes, les discours, les actions, les décisions....
Peut-on trouver cependant une définition, qui même si elle n’est pas juste, soit opérationnelle afin de permettre de lutter contre la bêtise ?

Est-ce un concept ? la bêtise résiste. On est absent à soi lorsqu’on est bête => difficulté à la définir comme un concept.
Les cognitivistes ne travaillaient pas sur la bêtise. Elle n’est pas modélisable, ni prédictible. Elle un peu comme l’humour.

Notre cerveau nous permet de repérer la bêtise et l’intelligence. Cependant, autant l’intelligence est relativement facile à définir (voir ci-dessus), autant c’est plus difficile pour la bêtise.

Il n’y a pas d’essence de la bêtise, par contre il y a des comportements bête, et on doit rester dans la vigilance de ses propres comportements bêtes. Oui mais vous dites la bêtise. Il n’y a pas d’être absolument, définitivement bête. A quoi est-ce qu’on repère ce qui n’a pas d’essence ? l’évidence de la bêtise, elle vous crève les yeux, et pourtant vous ne savez pas dire ce que c’est, comme la beauté, on voit un spectacle magnifique, on pourrait dire des goûts et des couleurs chacun ses goûts, mais si quelqu’un face à un coucher de soleil trouve ça laid vous allez le regarder comme un fou, la bêtise c’est comme la beauté, on ne sait pas ce que c’est mais... Mon problème n’est pas de définir la bêtise mais de savoir pourquoi je trouve bête certains propos ou comportements.

Ce qu’elle n’est pas :

  • Ce n’est pas une pathologie.
  • Ce n’est pas un déficit intellectuel, ce n’est pas : ne pas savoir. Ce n’est pas faire erreur.
    • "Il y a une distinction à faire entre l’idiot et le bête. l’idiot est celui qui ne sait pas (c’est la position du philosophe : il dit qu’il ne sait rien)." [7]
    • La bêtise ce n’est pas la bêtise des "bêtes".
  • Il n’y a pas d’essence de la bêtise, sinon on la reconnaîtrait immédiatement.

La bêtise ne peut se manifester que dans la langage.

Pour Deleuze, quand on est intelligent on peut être con. Et quand on est con on peut cesser de l’être.

On ne peut dire d’une personne qu’elle est intelligente et bête. Idem pour des propos. La bêtise semble donc l’inverse de l’intelligence.
Cependant il faut distinguer la bêtise d’un propos, d’une décision... et la bêtise d’une personne. Une personne intelligente peut dire les pires âneries et une personne bête dire des choses intelligentes.

Quelles sont les situations qui amènent à penser que la personne est bête ou agit bêtement ?

CONTEXTES ET CARACTÉRISTIQUES BÊTISE INTELLIGENCE
DISCUTER
 Il est inutile de discuter avec quelqu’un de bête [8].
C’est une personne avec qui on peut difficilement discuter :

  • Car elle est difficile à suivre dans son raisonnement.
  • Les paralogismes sont nombreux.
  • Elle est pleine de certitudes, sait tout et a réponse à tout.
  • Elle peut devenir agressive si elle est en difficulté.
  • La personne est irritante.
La discussion est agréable. On apprend des choses. On se sent plus intelligent à la sortie de la discussion. Voir ANNEXE II
ESPRIT CRITIQUE Il y a un manque d’esprit critique et surtout autocritique dans la bêtise :

  • “L’ignorance est soluble dans la connaissance, contrairement au sentiment de connaître, dont la bêtise repose sur la certitude de ne plus être concerné par la bêtise... la bêtise est donc de croire à la fois que les autres sont bêtes et qu’il suffit d’un peu de culture pour y remédier.” [9]
  • La personne est crédule
La personne se pose des questions, sait reconnaître si elle fait erreur. Sait reconnaître ses bêtises. On sent qu’elle peut se laisser convaincre et évoluer. [10]
PENSER Personne bête = personne dénuée de pensée :

  • Voir cet article de philippe zarifian
  • Bêtise = (non pensée ?) = intermittence de la pense. Elle peut survenir :
    • Au moment où on ne raisonne plus. Suspension de la pensée.
    • Dans l’intervalle entre des moments de pensée.
      Bêtise : moment où l’on ne pense pas => état normal du cerveau. [11]
CERTITUDES Le manque d’esprit critique amène la personne à avoir beaucoup de certitudes.

  • Bêtise = volonté d’aller vite à la conclusion (selon Flaubert). La bêtise consiste à conclure : pétrification de la pensée et des idées.
Elle n’est pas "pleine de certitudes". Elle peut en avoir, mais cela ne l’empêche pas d’être ouverte à l’argumentation. "On mesure l’intelligence d’un individu à la quantité d’incertitudes qu’il est capable de supporter." [12]
CONNAISSANCES “Il avait été du temps de sa superbe et de sa virtuosité l’orgueil d’une caste, qui avait cru jusqu’à l’aveuglement et jusqu’à l’imbécillité qu’elle était capable de tout expliquer et de tout juger de ce qui se produisait dans le monde, d’une corporation qui dans n’importe quelle botte de foin se croyait tenue de montrer aussitôt où passait le fil plus ou moins rouge de la révolution.” [13] Distinction entre la bêtise "ma bonne dame" et la bêtise "moi monsieur".

La deuxième est la bêtise active, prosélyte, cultivée, "intelligente", militante, érudite, de celui qui dit moi monsieur je ne suis pas dupe, on ne me la fait pas, moi monsieur ! bref la bêtise de celui qui croit savoir, la bêtise interventionniste de celui qui se donne une cause et s’y dévoue corps et âme, comme Bouvard et Pécuchet. L’un des travers de cette bêtise est le goût de l’exactitude.

Savoir dire je ne sais pas. Humilité de la science.
L’IGNORANCE "L’ignorance qui sait, qui se juge et qui se condamne, ce n’est pas une entière ignorance : Pour l’être, il faut qu’elle s’ignore soi-même" [14]. La bêtise ne connaît pas son ignorance. Savoir quand on ne sait pas
LIEUX COMMUNS Les lieux communs lui servent de pensée. Il pense faire preuve d’intelligence alors qu’il ne s’agit que de platitudes. Bêtise qui repose sur une bonne idée au départ puis s’est caricaturée elle même, s’est usée, et est devenu un poncif au lieu d’être une idée. Les idées neuves deviennent des idées reçues. Voir ANNEXE 1
AGRESSIVITÉ quelqu’un de bête est satisfait de lui même. Il n’est pas conscient qu’il dit des bêtises. Il n’en accepte pas la possibilité. Il peut être agressif lorsque sa bêtise le met en difficulté. Il se plaint alors qu’on le prend pour un idiot.
SIMPLISME/SIMPLICITÉ Le simplisme fait que la personne se retrouve souvent dans des situations compliquées. Résistance du réel. C’est dur de penser, et on cherche des subterfuges pour penser plus vite qui vont nous coûter encore plus. Penser avec des raccourcis c’est prendre un chemin plus long qu’avoir l’audace de penser. Erreur qui consiste, pour pouvoir s’épargner un peu d’effort, à faire trois fois plus d’efforts. Déni de la réalité. faire compliqué alors qu’on pouvait faire simple. La simplification est obligatoire pour parler des problèmes complexes. La personne intelligente sait simplifier sans verser dans le simplisme.
VRAIS/FAUX PROBLÈMES N’est pas capable de débusquer ce qui est un vrai et un faux problème, ce qui est plus difficile... La personne se noie dans de faux problèmes. Pour Descarte, la science c’est la capacité à résoudre les problèmes. Idem la pensée, pour Deleuze, elle consiste à trouver les problèmes et à parvenir à les résoudre [15].
La bêtise c’est la faculté de poser des faux problèmes ou de ne pas en poser.
COMPLIQUER L’homme bête c’est celui qui fait compliqué là où l’on peut faire simple : voir simplisme et faux problèmes.
RÉPÉTITION La passion du même, de la répétition, qui est une passion mortifère.
EGO
Trop d’ego rend bête.
Grande source de bêtise, la manie de notre époque de mettre notre ego en avant. La bêtise c’est croire que l’on est plus intelligent que ce que l’on est réellement. C’est un rapport à soi-même particulier.
PRÉJUGÉS
Trop de préjugés rend bête.
CONFORMISME
La recherche éperdue du consensus peut mener à la bêtise
Une des formes de bêtise les plus avérée est le conformisme ou la tentation du conformisme. L’adhésion à l’opinion commune est parfois un signe de bêtise. La bêtise c’est tomber dans le confort d’une pensée qui nous donne le sentiment d’avoir raison, qui nous assoit quelque part, nous met à l’aise avec nos semblables, dans les mêmes discours, dans les mêmes constructions. On se sent renforcé par le nombre qui pense comme nous même si c’est un petit nombre, le petit nombre de ceux qu’on trouve intelligent. C’est très confortable, douillet.. Il y a aussi la position de celui qui croit qu’il faut être seul contre tous pour avoir raison. Il y a cependant parfois de très bonnes opinions communes. C’est par raison et non par confort que la personne intelligente adhère à une opinion commune.
RIRE Il y a un côté prévisible et mécanique dans la bêtise. C’est pourquoi, parfois elle fait rire. Pour Bergson, le rire c’est de la mécanique plaquée sur du réel. L’intelligence, elle, est créatrice.
    • Le sot est celui qui par stupeur ne bouge pas. la stupéfaction, c’est le moment où la pensée s’arrête. la pensée, c’est la pensée rationnelle. C’est l’idée que la pensée rationnelle met en mouvement. Il y a des moments où la pensée n’est pas là. Bouvard et Pécuchet et l’antipode = bêtise active. Immobilité et hyperactivité se rejoignent au titre d’une forme d’inefficacité, une inadéquation totale entre l’entreprise, la volonté, l’acte et le résultat.
    • la bêtise vue de dedans, ressemble à s’y méprendre au talent et vue du dehors elle a toute les apparences du progrès, du génie, de l’espoir et de l’amélioration. [16]
    • C’est de ne pas mener ses combats aux justes endroits.
    • C’est la pétrification de la pensée.
    • C’est l’esprit de système. Ce sont les faiseurs de système qui batissent des univers hermétiques à toute réfutation et qui donc d’une certaine façon ont toujours raison.
    • Elles ne disent pas de "bêtises" ou rarement.. Et surtout, dans ces cas elles savent corriger le tir.
    • Ce n’est pas lié au niveau scolaire. Dans les forums de discussion, il y a des commentaires intelligents et d’autres non ; il y a des personnes n’ayant pas réussi à l’école, et pourtant intelligentes dans leur conception du monde, dans leur façon de répondre, de discuter, de résoudre leurs problèmes.

Une personne bête... c’est donc une personne qui ne sait pas sortir du cadre qu’elle s’est donné ou qu’on lui a donné. De même pour les actions et les décisions...

Analyse

"L’image dogmatique de la pensée est toujours à la recherche du même
, elle est dominée par ce modèle de la recognition. dans ce modèle le seul négatif qu’on est capable de penser, c’est l’erreur. La seule négativité de la pensée dans ce modèle est de se tromper. Or il y a d’autres formes de négativité : la bêtise, la folie, la méchanceté. Elles font intervenir des formes de non sens."

"On pense sous l’effet d’une rencontre. On rencontre des gens, et c’est à travers ces affects qu’on va se mettre à penser. On peut rencontrer plein de gens sans rencontrer personne. On est affecté par les choses. On est pris par les choses. On doit maintenir une forme d’ouverture à ces conditions.
La bêtise c’est important c’est une condition de la pensée car cela nous force à penser. On ne peut penser que si on est forcé à penser. Si on comprend comment c’est possible qu’on soit bête, c’est à dire qu’on soit dans cette inertie, de stupeur, et bien on comprend aussi comment c’est possible de penser.
La bêtise, ce confort de la pensée...
On pense toujours sur fond de bêtise. On ne peut en sortir. De même qu’on est proche de la folie.
Penser n’est pas une affaire de bonne volonté, c’est une affaire d’affect et de rencontre. Ce n’est pas quelque chose que l’on décide."

Importance de la lutte contre la bêtise

Cette lutte est importante car si le manque d’intelligence est dommageable, la bêtise est un grave problème. Elle est irritante lorsqu’on est à son contact, elle est toxique en groupe et elle est à l’origine de beaucoup de souffrance [17].

Comment lutter contre la bêtise ?

Nous ne sommes pas toujours conscients de la notre... Cet article n’est-il pas lui-même un tissu d’âneries ?
"La bêtise est toujours possible pour soi même. Savoir la reconnaître en soi comme structurale. Il faudrait accepter que la bêtise soit naturelle, et donc accepter de ne pas en sortir. C’est comme notre ombre. On ne peut la représenter, on ne peut la combattre, on fait avec."
Mais quelqu’un qui accepte sincèrement l’hypothèse de sa bêtise est-il bête ?
On n’est bête qu’involontairement ou inconsciemment. Si on se sait bête, on n’est pas bête.
Comment repérer la bêtise chez soi ?

"Well, it seemed like a good idea at the time" [18]
Cette expression décrit à merveille la principale caractéristique de la conscience : être conscient, ce n’est pas seulement se rappeler ce qui s’est passé, c’est se rappeler la façon dont notre esprit percevait les choses, y compris ses propres idées, et être capable de porter sur nos perceptions passées un regard rétrospectif critique. cette capacité de réflexion est le signe distinctif , s’il en est, de l’intelligence. [19]

Essayons de repérer les discours — et les gens — intelligents. Demandons-nous en quoi ce qui est dit ou fait est intelligent.

Soyons aussi critiques envers nos discours, décisions et actions.

A un moment ou l’autre tout le monde est concerné par la bêtise. Il faut donc se méfier de soi-même, être dans le doute. Le remède à l’erreur n’est pas la vérité mais le doute. Il faut pratiquer le doute, c’est à dire la vigilance à l’égard de soi même, tous les jours et à toutes les minutes.

Au lien d’attaquer la bêtise (et la connerie) [20], soulignons au contraire l’intelligence de certains propos ou de certaines personnes. Cela permettra peut-être à la discussion de mieux avancer (et disqualifiera ceux qui se croient très intelligents) : il existe une émulation de l’intelligence.

Lorsqu’on est bête on accède directement au réel (car le réel est idiot). l’idiotie est pleine adhésion à la réalité (traité de l’idiotie).
Allégresse (?) = amour du réel brut (= qui ne signifie pas).
Nous n’avons pas de position de surplomb % réel. On peut sortir de la bêtise lorsqu’on recherche du sens.

La tache de la philosophie c’est de nuire à la bêtise [21]. Comment fait-on ? Une philosophie qui n’attriste personne et ne contrarie personne n’est pas une philosophie.

La notion de bêtise a à voir avec la condition du citoyen avachi, abêti, qui a renoncé à se sauver de sa condition, à critiquer son état, pour s’endormir sur ses lauriers de démocrate. Abêtissement = société du spectacle de Debord. Processus plus conceptualisable, la démocratie a intérêt à l’abêtissement (et non la tyrannie qui écrase l’opinion publique). la démocratie laisse libre l’opinion mais l’abêtit. Le capitalisme n’a surtout pas besoin de l’esprit critique pour avancer : la télé, l’économie de marché tient lieu de coercition plus subtile. Au lieu de lui mettre des barreaux ou de dissuader de sortir, on lui propose de la publicité et de la propagande. L’économie de marché à besoin de l’abêtissement pour qu’on consomme, pour qu’on soit des consommateurs et non des esprits critiques. Est-ce que dans le fait d’attribuer une intention à l’économie de marché, il n’y a pas une forme de mystification %soi même. Après tout, tout ceci n’est que des mécanismes, on peut les décrypter. L’économie de marché, c’est nous. Lien bêtise et servitude volontaire (La Boëtie).
On ne vit sous la puissance de tyrans qui ne sont que des tyrans de papier et il nous faudrait une pichenette pour les renverser, et on est incapable parce que c’est trop facile, parce qu’il est trop agréable d’être abêti. Il faut faire des efforts pour sortir de l’abrutissement, et c’est trop facile de se vautrer dans la facilité.

Comment peut-on être Persan ? Monter en descendant ? C’est le moment où on est incapable de comprendre le réel. c’est un état de fermeture, un état d’incrédulité.

la bêtise est liée à une clôture de l’identité, or l’identité est un processus.

Le contraire de la bêtise : le goût des autres.
“L’intelligence des Écritures se mue en connaissance et en amour, car elle est avant tout relation entre deux personnes.” [22]

Et surtout : montrons l’exemple !

Conclusion :

Il existe une intelligence de base, naturelle, variable selon les individus.
Chaque personne peut plus ou moins bien exprimer cette intelligence naturelle. Des facteurs s’y opposent. j’en retiendrai deux :
 D’abord la passion. On connaît la tirade du misanthrope "oui je le sais, ma raison me le dit chaque jour, mais la raison n’est pas ce qui mène l’amour" (de mémoire).
 Même sans passion, la personne peut, sans raison apparente, ne pas faire fonctionner son intelligence, sa pensée, c’est à dire ne pas exercer son esprit critique et autocritique. Ceci explique que tout ce qu’on pense, dit ou fait par bêtise engage la responsabilité morale de l’être humain : "il aurait pu éviter de faire une "mauvaise" action, il a tout les moyens intellectuels pour cela." Dans ce cas, on est responsable de ce que l’on pense et de la manière dont on se conduit. [23]

BROUILLON

"L’intelligence de la bêtise" : voir émission sur la bêtise avec Belinda Cannone et ici

« La logique est la géométrie de l’intelligence. Il faut de la logique dans la pensée. Mais on ne fait pas plus de pensée avec la logique qu’on ne fait un paysage avec de la géométrie » Victor Hugo, post-scriptum de ma vie

Carte vitale biométrique : l’idée loufoque de la droite contre la fraude
http://www.egora.fr/node/210742/talk

"Je suis bête, je n’ai pas réfléchi". La bêtise n’est pas de "mal réfléchir", mais de ne pas réfléchir (alors qu’on aurait pu le faire).

Tout le monde, même les plus intelligents peuvent dire des bêtises. En général l’esprit critique et autocritique permet d’en prendre conscience. Se croire plus intelligent qu’on est témoigne d’un manque d’esprit critique, [24] et l’on dit alors des bêtises à profusion.

http://www.franceculture.fr/emissions/la-grande-table-2eme-partie/vers-la-fin-de-la-guerre-contre-les-drogues

ANNEXE 1

Distinction entre la bêtise "ma bonne dame" et la bêtise "moi monsieur".
La première est la bêtise "passive" de celles et ceux, qui parce qu’ils n’ont aucune clé se contentent d’enfoncer les portes ouvertes : tout se perd ma bonne dame... C’est la bêtise de celui ou de celle qui au lieu de dire que sais-je ? n’arrête pas de dire oh ! qui sait ?

La bêtise c’est la passion grégaire dans la langue. c’est à dire sauter sur tous les poncifs.
Ce qui fascine Deleuze dans la bêtise dans un premier temps c’est que effectivement on peut dire la vérité et être profondément bête : "il pleut ou il ne pleut" pas c’est vrai, c’est même toujours vrai et c’est profondément bête de le dire." « Les professeurs savent bien qu’il est rare de rencontrer dans les devoirs des erreurs ou quelque chose de faux, mais des non sens, des remarques sans intérêt, sans importance, des banalité prises pour remarquables des confusions de points ordinaires avec des points singuliers, des problèmes mal posés ou détournés de leur sens, tel est le pire et le plus fréquent pourtant gros de menace, notre sort à tous » [25] “Comment fonctionne le sens ? on peut poser la question du sens à différents niveaux. Celle qui intéresse particulièrement Deleuze est la question du non sens : il y a les absurdités, le non sens Anglais , et la bêtise qui est une forme de non sens tout à fait étonnante puisque c’est une sorte de blocage de la pensée, une platitude un cliché, un lieu commun, quelque chose qui fait que la pensée est arrêtée dans son mouvement. René Thom disait : "ce qui nuit au vrai n’est pas le faux, c’est l’insignifiant", et que "les théorèmes il y aura toujours des imbéciles pour les démontrer" sous entendant que le vrai problème était de trouver le théorème intéressant.”

ANNEXE II

Une personne intelligente est "une personne avec qui on peut discuter" pour les raisons suivantes [26] :

  • Elle comprend facilement les choses parce qu’elle est ouverte, et qu’elle n’a pas d’a priori.
  • Elle comprend qu’on ne doit pas généraliser à partir d’expériences personnelles.
  • Elle peut penser contre l’opinion commune.
    Exemple extrait du forum : « Encore une mesure pour pointer du doigt les "mauvais français" et manifestement ça fonctionne ! Il ne manque plus qu’un numéro vert pour dénoncer son voisin !! »
  • Elle aime penser. En tout cas, cela ne lui fait pas peur.
  • Elle s’en tient ou en revient souvent aux faits. Elle cherche l’exactitude. Ses interventions sont courtes et précises. Elle ne s’étale pas.
    A la question/affirmation de "mcg" de Nantes :
    Les salariés de la fonction publique sont-ils également contrôlés ? il semble que non ...
    Christian de Paris écrit : « En réponse à mcg de nantes , les salariés de la fonction publique sont contrôlés !Et ce sur demande de l’institution qui l’emploie »
    Autre exemple tiré de ce forum : « Votre article ne précise pas si ce seront des médecins de la Sécu ou du secteur privé qui interviendront le samedi et dimanche ! PS la cnam a déjà employé des médecins du privé dont les notes étaient salées
     »
  • Elle répond aux questions, elle ne cherche pas à se faire mousser (elle cherche la communication) : "En réponse à mcg de Nantes ....."
  • Elle a de bons arguments : « C’est bien de contrôler les arrêts maladie ,mais il faudrait aussi et surtout contrôler les entreprises qui causent beaucoup de stress et de dépression et de suicide .Celles -ci ont beaucoup trop de gardes chiournes qui détruisent les employés »

ANNEXE III : L’OUVERTURE au réel et aux autres


A31
“L’intelligence du texte sacré n’est pas lié à une formation intellectuelle, elle relève uniquement de la qualité d’ouverture du cœur. Celle-ci appartient à la structure de l’homme intérieur ; elle peut être coagulée ou fluide, c’est à dire bloquée ou privée de nœud dans la mesure où la spontanéité intérieure a été conservée ou reconquise.” [27]

BROUILLON

C’est souvent par bêtise qu’on dit/fait des conneries
la banalité de la bêtise explique peut-être la banalité du mal.
Il ne s’agit pas d’objectiver (mesurer) la bêtise mais de pouvoir la repérer, pas pour la combattre car c’est probablement impossible mais pour la fuir.
Il s’agit de réfléchir sur le maniement de sa propre pensée et "mieux comprendre la conduite d’autrui". Ce qui "ne peut que déboucher sur la prudence que l’on doit apporter dans sa réflexion comme dans son action".

Steve Jobs
https://www.lexpress.fr/actualite/sciences/quand-steve-jobs-refusait-la-technologie-pour-se-soigner_1938554.html
"en octobre 2003, on lui découvre une tumeur neuroendocrine du pancréas, qui est de bon pronostic si la maladie est soignée tôt. Les médecins expliquent à Steve Jobs qu’il est urgent d’enlever la tumeur, mais il refuse. Malgré les protestations de son entourage, il se soigne avec des médecines "douces et parallèles". Il mange bio, consulte des guérisseurs, des naturopathes, utilise l’acupuncture, avale des gélules de plantes et boit des jus de fruits... "

Quand une action, une politique va à l’encontre des buts affichés, est contre productive, manifestement inefficace ou avec des effets pervers, on peut s’interroger sur l’intelligence de la personne qui a mis en place la stratégie ou sur les buts réels.

L’ignorance est soluble dans la connaissance, contrairement au sentiment de connaître, dont la bêtise repose sur la certitude de ne plus être concerné par la bêtise.... [28]
“Au poète qui trouve la Terre « bleue comme une orange », l’imbécile répond — à juste titre — que c’est impossible.” [29]
“La bêtise ne doute de rien. Les croyances sont les moulins à vent de la bêtise.” [30]

« Il n’est pas rare de trouver des hommes très instruits, qui laissent sans cesse apercevoir, dans l’usage qu’ils font de leur science, ce vice irrémédiable » [31].

« La bêtise donne à son héraut le sentiment flatteur de la marginalité » [32]

« Vanité et bêtise poussent sur la même tige. » [33]

La bêtise brandit des évidences comme autant de trouvailles.

Action bête. Peut-être le fait d’une personne intelligente. Pour une raison ou une autre elle n’a pas fait travailler son intelligence.

http://www.francetvinfo.fr/replay-radio/8h30-aphatie/alain-minc-l-affaire-penelope-fillon-ressemble-a-un-long-naufrage_2039295.html
"Ce qui me surprend d’un homme politique aussi expérimenté, c’est qu’il ait pu tenir des propos ’Je lave plus blanc que blanc", en ayant cela à l’esprit. Comme c’est un homme intelligent, cela veut dire qu’il n’avait pas la mesure que ce genre d’attitude pouvait poser problème", a-t-il ajouté.

« Tous les instincts de liberté qui allaient éclater si formidablement tout à l’heure, et jeter par terre un trône séculaire, trouvaient leur expression dans les notes insugées d’Auber. L’air si entraînant :
Amour sacré de la patrie,
Soutiens l’audace et la fierté ;
A mon pays je dois la vie,
Il me devra la liberté !

était chaque fois bissé et acclamé. Un gouvernement intelligent aurait étudié ces symptômes de l’esprit public, et se serait conduit en conséquence. Mais les gouvernements ne se doutent jamais des révolutions que le lendemain. » [34]

« Les hommes sont si bêtes que la grandeur et la simplicité les repoussent plus qu’elles ne les attirent. C’est par la petitesse et par l’habileté qu’on les retient. » [35]

https://www.pauljorion.com/blog/2019/01/03/un-pas-de-geant-pour-une-machine-a-jouer-aux-echecs-par-steven-strogatz/


https://www.facebook.com/franceculture/posts/10158769152933349

https://www.franceculture.fr/emissions/superfail/la-connerie-lechec-de-lintelligence-0 ?
"Le psychologue rappelle tout d’abord que la « sottise » - terme qu’il utilise pour désigner la « connerie » des gens intelligents - est le produit d’une distorsion naturelle de la réalité que l’on nomme « biais cognitif » :

Ce qu’on appelle les biais cognitifs, ce sont les espèces de raccourcis de la pensée qui font qu’on caricature la réalité pour que ça entre bien dans nos cartes de pensée, qu’on puisse s’adapter très vite, qu’on n’ait pas trop à réfléchir.

Et parmi ces biais cognitifs, Jean-François Marmion explique que le plus dangereux pour l’intelligence semble être le « biais de confirmation », "


[1que "A entraîne B"

[2Jean-Yves Girard dans son livre : "Le point aveugle".

[3Article de Jean-Paul Delaye

[4J Y Girard. Livre cité ; page 30

[5Il faut avoir un peu lu le début de son livre pour bien comprendre l’extrait ci-dessous

[6"On veut toujours que l’imagination soit la faculté de former des images. Or elle est plutôt la faculté de déformer les images fournies par la perception." Gaston Bachelard, L’Air des songes, p5)

[7"L’idiot c’est l’homme de la raison naturelle ou lumière naturelle."

[8Le sens 2 est toujours sous entendu

[9Raphaël Enthoven. Philosophie Magazine février 2009

[10Les notions de souplesse et d’adaptabilité sont au cœur de la définition de l’intelligence.

[11"Si l’on pense trop il s’agit de folie extravagante plus que de bêtise."

[12Kant

[13Paul Thibaud, à propos de Sartre. Esprit Juillet 1980

[14Montaigne

[15Or ceux qui nous dirigent font en général le contraire : éviter les problèmes pour ne pas avoir à les résoudre

[16Musil

[17Elle est alors souvent étiquetée : "connerie"

[18C’est ce que je croyais jadis mais je me suis complètement trompé

[19Entretien avec Daniel C. Dennet. La recherche sept 1999

[20En effet attaquer la bêtise est en général inutile ou très difficile (surtout si on a peu de temps pour cela) puisqu’ils s’agit de gens "fermés"

[21Nietsche

[22M M DAVY L’homme intérieur et ses métamorphoses.

[23Je pense à certains malades qui "s’enferment" dans la maladie ; ils ne sont pas coupables d’être malade, mais ils sont responsables de ne pas se donner tous les moyens pour guérir. Ils sont alors responsables — en ce sens très étroit — de l’absence de guérison.

[24Le manque d’esprit critique n’est cependant pas synonyme de bêtise.

[25Deleuze

[26Les exemples, ne sont qu’à titre illustratif : ils peuvent en effet être critiquables. Ils sont extraits du forum de discussion LCI sur le contrôle des arrêts de travail

[27M M DAVY L’homme intérieur et ses métamorphoses.

[28Enthoven

[29Enthoven

[30Enthoven

[31Kant

[32Enthoven

[33Musil

[34Alexandre Dumas. Le trou de l’enfer. p455

[35Alexandre Dumas. Le trou de l’enfer. p457

Messages

  • Votre article « L’essai sur intelligence et bêtise » est épatant
    Je trouve ce travail surprenant, original et roboratif.
    Moi j’y réfléchis d’une autre manière : « La bêtise chez des gens intelligents ». En fait c’est un très grand problème que plusieurs auteurs ont essayé de résoudre. Par exemple il y a eu sur ce sujet un merveilleux dialogue à l’émission Répliques de Finkielkraut que j’ai même enregistrée !
    Quant à moi j’y réfléchis parce que j’y ai été confronté assez souvent mais je ne sais pas comment commenter ce phénomène paradoxal. D’autant plus que nous sommes tous, peu ou prou, menacé par ce phénomène redoutable.
    Nous connaissons quelques exemples. Le plus intéressant a été l’étonnant épisode de Raymond Barre, l’immense naïveté de DSK homme intelligent qui se fait prendre comme un gamin et d’autres encore. Parmi mes collègues j’avais un ami remarquable, d’abord latiniste et helléniste, qui parlait latin avec son épouse, qui parlait russe et anglais mieux que les autochtones, qui était devenu médecin des hôpitaux chef de service et qui savait tout sur tout. Et que j’aimais beaucoup. Et bien de temps en temps il disait d’énormes bêtises suscitées par une sorte d’idéologie personnelle. J’en suis encore baba.
    Bon ça m’est arrivé mais je m’autocritique ! Mais je ne sais pas d’où ça vient. Sans doute qu’Audiard aurait eu une réponse. Dans le genre « Les cons ça ose tout et c’est à ça qu’on les reconnait ». Mais ça n’explique pas pourquoi ça surgit chez des gens intelligents.
    Dr Ludwig Fineltain