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Modèle pour les somatisations.[version 0.20 du 17/08/2009][Ancienne version 0.12 du 08/12/2008]

lundi 17 août 2009, par omedoc

Hystérie, Hypocondrie, symptômes physiques de la dépression, de l’anxiété, du stress, spasmophilie, fibromyalgie, troubles somatoformes... une même "maladie" [1] sous différentes formes cliniques.

De tous temps les hommes ont somatisés. Mais le polymorphisme de la symptomatologie d’origine psychogénétique n’a été reconnue que récemment. Au départ les Egyptiens puis les Grecs n’ont reconnu comme affection que les formes cliniques spectaculaires et par trop aberrantes. Il s’agissait de douleurs et de symptômes survenant par crise (Plus tard simulant des crises d’épilepsie) et touchant des zones variables dans le temps. Pour expliquer ces crises et ce polymorphisme, vu que seule les femmes semblaient en souffrir, Les grecs pensaient que c’était l’utérus qui se baladait dans tous le corps. Cette forme de somatisation a donc été appelées "hystéria" par les Grecs. terme issu de "hystera", c’est à dire utérus. Par la suite le modèle de l’utérus a disparu car le champ de l’hystérie s’est élargi. On s’est aperçu que des symptômes équivalents se retrouvaient chez les hommes, d’autant plus que Sydenham (1624-1676) avait montré non seulement que l’affection hystérique était très fréquente mais « qu’elle imite presque toutes les maladies qui arrivent au corps humain ». On s’aperçoit déjà un des caractères de l’hystérie, c’est qu’elle imite des maladies organiques. Paradoxalement, du fait de l’organicisation actuelle de la fibromyalgie, la patiente fibromyalgique sera ainsi souvent amené à imiter la fibromyalgie, et ainsi à la redoubler.... Par ailleurs va se poser le problème actuel de ne pas passer à coté d’une maladie organique. Une autre constante est la prédominance féminine dans certaines formes cliniques de la somatisation (spasmophilie, fibromyalgie). Pourquoi ces formes cliniques sont elles plus particulièrement féminines ?

Nous allons ensuite voir se développer l’hypocondrie plus dépressive et centrés sur les troubles digestifs (d’où le terme). [2] Ce qui a probablement marqué les médecins c’est le caractère délirant de la croyance :

"Ils passent un temps incalculable chez leurs médecins et dans les pharmacies. Au moindre doute, ils sollicitent un examen plus poussé… Leur sujet de prédilection ? Leur santé. Ou plutôt, leur mauvaise santé ! Persuadés d’être atteints de maux aussi divers que variés, avec une préférence pour les troubles mortels, les hypocondriaques peuvent, tour à tour, nous émouvoir, nous inquiéter, nous faire sourire, nous exaspérer voire, pire, nous rendre malades. " [lu ici.]]

La fibromyalgique est de même persuadée d’avoir une maladie organique, et souvent d’avoir une autre maladie que la fibromyalgie. D’où ses recherches incessantes, même lorsque l’étiquette a été donnée. C’est aussi le cas des troubles somatoformes tels que définis dans la CIM 10.

Nous aurons ensuite les somatisations en rapport avec la mélancolie, puis l’anxiété et le stress. On a même parlé dans certains cas, à propos de certaines formes cliniques de somatisation, de dépression masquée.

Puis récemment la spasmophilie qui a quasi disparu et enfin la fibromyalgie en France (et le syndrome de fatigue chronique aux USA).

On ne devrait donc plus parler d’hystérie, d’hypocondrie, de spasmophilie, de fibromyalgie… etc mais de somatisation et/ou troubles somatoformes.

Il existe en effet une unité profonde entre ces différentes affections : psychogénèse (en fait souvent bio psycho socio génèse). Très grande variabilité de la présentation, troubles d’allures somatiques sans cause organique objectivable malgré les examens et la durée d’évolution.

Pour expliquer cette évolution historique il faut donc faire appel à deux phénomènes causaux.

L’isolement plus ou moins difficile des différentes formes cliniques. On a dans un premier temps l’isolement d’une présentation clinique en tant qu’entité avec une définition précise. Par la suite l’étiquette tend à être collée à d’autres présentations et à se diluer dans les autres formes.

La construction sociale des différentes formes cliniques. D’où des phénomènes de mode. La somatisation reste "une", à travers ses différentes versions.

Qu’est-ce qui fait l’unicité des différentes formes ? C’est la psychogénèse.

On devra donc construire un modèle de la psychogénèse expliquant la relation entre corps et psyché et les différentes formes cliniques, ainsi qu’un modèle de la construction sociale.

Modèle de la psychogénèse

Une pathologie peut entraîner ou non une douleur. C’est le cas des pathologies dégénératives. Une rhizarthrose peut être très douloureuse chez certain et totalement indolente chez d’autres. Cela dépend bien sûr de la réaction de l’organisme, mais aussi peut être de l’état cérébral de bien ou mal être. En dehors de la douleur on peut avoir, de la fatigue, des troubles digestifs, des vertiges….

Une émotion, un stress, un traumatisme psychologique, des conditions de vie difficile peuvent aussi être à l’origine du même type de sensations "anormales", probablement par l’intermédiaire de troubles biochimiques. On sait par exemple que le stress entraîne la sécrétion d’adrénaline et de corticoïde. D’où des sueurs, palpitations, diarrhées…

Il faut distinguer entre douleur et souffrance. La sensation c’est la vérité du symptôme. Elle est inaccessible, même pour le patient. En effet c’est à travers la perception qu’il prend conscience de la douleur, et comme toute perception celle-ci peut-être altérée. On peut soit ne pas s’apercevoir du symptôme, ne pas faire attention à lui, soit au contraire il envahit tout le champ de la conscience, et on ne "voit" que lui. C’est le sens que l’on donne à la maladie, c’est l’inconscient qui parle.

Le médecin a accès à la perception interne du patient à travers son comportement, son attitude, son visage, le ton de sa voix, etc... Une douleur vécue de façon très intense se voit sur le visage.

Le traitement antalgique (dont les morphiniques) sont efficaces sur la sensation/réalité du symptôme mais pas sur sa perception. Témoignage : « Je suis nouvelle sur ce site ; je vous salut tous et toutes:j’ai pris connaissance de vos discutions : et je vous pose la question:quelqu’un a t’il ou elle déjà été traitée avec la morphine ;a t’il ou elle à eue des résultats pour les douleurs de la fibro !! j’ai commencée il y a 3 jours ;et à part les effets secondaires pour l’instant les douleurs sont toujours là :merci de vos réponses : ». Si la morphine n’est pas efficace c’est que la fibromyalgie est bien liée à un trouble de la perception, et non à la réalité d’une sensation.

Il y a enfin le jugement du patient sur ce qu’il vit. Il peut y avoir un décalage entre la perception et le jugement, c’est à dire entre sa présentation et sa parole. Le décalage peut se faire dans un sens ou dans l’autre. Typiquement, un patient hystérique qui a le bras paralysé en est cependant peu préoccupée. Au contraire une personne fibromyalgique va coter ses douleurs 10 sur 10 sans que son visage soit altéré.

Les décisions, et les actions ("consommation" médicale en particulier) découlent de cette chaîne . Probablement qu’en général c’est toute la chaîne qui dysfonctionne.

Niveau 3

Causalité sociologique

Pour la même pathologie les conséquences médicales seront proportionnellement différentes de nos jours par rapport à il y a plusieurs années. Avoir mal au dos après une journée de travail physique était, il y a 50 ans, le signe qu’on avait bien travaillé. De nos jours c’est un signe négatif qu’on s’est "abîmé" le dos. Il s’agit d’un exemple de causalité sociale.

Causalité cognitive

Les somatisations sont parfois corrélées à une certaine crédulité. En témoigne le recours aux médecines "parallèles" : magnétiseurs, promesses de toute sorte sur internet...

« Nous avons le pouvoir, en changeant notre représentation des choses, de changer aussi la façon dont elles nous affectent. » [3].

Niveau 2

Déni partiel ou total de grossesse : 2000 femmes enceintes par an en France [4]. Il est caractérisé par une absence de représentation de l’enfant. Il existe une abolition du discernement. Voir cet article.

« 
On ne voit que ce qu’on regarde.
 » Maurice Merleau Ponty

Brouillon

Pierre Marty : mentalisation = capacité d’un sujet à pouvoir ou non, traiter mentalement les différents obstacles de la vie. Les sujets à bonne mentalisation ne somatisent pratiquement jamais. Les sujets à mauvaise mentalisation feront des somatisations graves lésionnelles.

Les troubles fonctionnels : Absence d’explication mesurable à son interprétation de la psychogenèse des symptômes, Le malade commente l’inefficacité thérapeutique comme un argument évident de la nature organique de ses troubles. Conviction commune que tout symptôme doit s’expliquer, toute souffrance relève de la médecine. la psychologisation tend à occulter le rôle des facteurs sociaux ou culturels.

Hypothèse : certaines somatisations peuvent guérir lorsque la personne trouve un sens à sa vie. Ce sens est parfois liée à l’adhésion à une prise en charge ésotérique de leur somatisation. La guérison est toute relative car s’ils ne souffrent plus, ils délirent parfois. Le sens trouvé à leur vie (et non à la maladie) doit être enrichissant et libérateur.


[1Les termes de maladie ou de pathologie ne sont peut-être pas les plus adaptés, je les emploie par commodité : voir mon article sur la définition de la maladie

[2Le terme hypocondrie a été créé par Hippocrate pour désigner des sujets qui se croyaient victimes de maladies affectant les organes abdominaux appelés les hypocondres.

[3Charles Pépin, reprenant les propos d’Epicure. philosophie magazine de nov 2008

[4le quot du médecin 29 oct 2008