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Arguments portant sur la causalité [brouillon]

mardi 17 mai 2011, par omedoc

LES FAITS :

L’interrogation sur les causes des phénomènes est une interrogation naturelle car vitale. C’est une nécessité si nous voulons éviter de répéter les mauvaises expériences et si nous voulons, inversement, reproduire les bonnes. Mais le risque d’erreur est important car les facteurs explicatifs sont souvent multiples, car il y a « cause » et « cause », et bien sûr du fait des erreurs de logique et d’inférence statistique. [1]
Le plaisir d’essayer de comprendre le monde fait que nous recherchons le pourquoi des choses. [2] La recherche d’une cause permettrait de mieux traiter...? . Enfin nous cherchons souvent des responsables à accuser ou à féliciter…
Sous le terme d’arguments de causalité je mets :
L’argument dit : “Post Hoc ergo propter hoc”.
L’argument de corrélation.
L’argument de coïncidence.
L’affirmation de causes.

Argument “Post Hoc ergo propter hoc”

Post Hoc ergo propter hoc : « après cela, donc à cause de cela »
Il s’agit d’un lien dans le temps qui devient un lien de cause.
L’argument est en général fallacieux car il y a sous estimation des effets du hasard, de la fréquence des coïncidences, de l’évolution naturelle des maladies….
Il existe aussi une sous estimation des difficultés d’évaluation de la réalité du changement comparé à l’état antérieur.

Les exemples sont nombreux dans le cadre de la recherche d’une cause de maladie ou de l’efficacité d’un traitement, ou du responsable d’une erreur…

« J’ai essayé de multiples traitements... seul celui-ci m’a réussit. »
« Mon fils était tout le temps malade.. Il n’est plus malade depuis qu’il a pris ce traitement. »

« Médecin, j’étais réservé sur l’ostéopathie. Mais après une hernie discale et un accident de moto, j’ai développé une arthrose importante du genou. Depuis que je vois un ostéopathe, je cours à nouveau 30 minutes d’affilé, je refais du vélo et je nage sans avoir besoin d’antidouleur. » « Et il est suivi régulièrement depuis10ans. » [3] [4]

 Voir aussi cette histoire du Docteurdu16
 Voir cet article du monde

Conditions d’acceptabilité de ce type d’argument :

  • Un traitement guérissant une maladie toujours mortelle (Ex le sérum contre la rage).
  • Un traitement guérissant presque toujours une maladie presque toujours mortelle.
  • Un traitement améliorant significativement ou guérissant souvent une maladie rarement ou totalement non guérissable (SEP, SLA)

En effet dans ces cas, il n’y a pas besoin d’essai thérapeutique contre placebo, puisque très peu de cas, ou même un seul cas suffit.

En général l’inférence se fait donc sur un cas.
Rarement la personne parle de deux ou trois cas… et il faut alors faire préciser tous les cas car le risque de mensonge est important.
Lors des essais thérapeutiques une seule étude ne suffit, il faut une deuxième étude pour confirmer ou non la première. Il faut donc savoir ne pas changer ses habitudes de prescription trop précipitamment.

Les médecins, et on peut le comprendre, hésitent beaucoup à represcrire un médicament qui a été à l’origine d’un effet secondaire important ou qui a été trop mal supporté … Surtout si l’incident est survenu lors des premiers essais de prescription, et surtout s’il y a un traitement alternatif..
En fait cette attitude se comprend très bien d’un point de vue psychologique même si elle n’est pas rationnelle, puisque le médecin devrait plutôt se baser sur les études de pharmacovigilance. C’est par exemple le cas de la prescription des antalgiques de palier 2 et du choix entre la codéine et le tramadol.
De même pour l’efficacité thérapeutique des antidépresseurs par exemple, les médecins vont juger plus selon leur expérience que selon les études. Bien sur les études sont critiquables et ne concernent parfois pas les patients de ville, mais l’expérience personnelle est aussi critiquable… Démonstration..

Discours croisés de médecins : vaccination contre la grippe et syndrome de guilain barré
Notion de VPP et VPN. ; ; Il fumait et il a eu le cancer... il ne fumait pas et il a eu le cancer quand même... Il a toujours fumé et il est mort de vieillesse...
Inversion de la cause et de la conséquence

Par comparaison à un groupe témoin
Essais thérapeutiques contre placebo, en double aveugle,....
Tests diagnostiques

"La guérison suivant la prise d’un médicament peut-être liée à trois causes :

le médicament a été efficace
le malade a guéri tout seul selon l’évolution naturelle de sa maladie
le malade a guéri grâce à l’effet placebo." Voir cette source

Argument de corrélation

Il y a souvent dans ce cas confusion entre la corrélation et la causalité.

Intervention d’un médecin dans un groupe de discussion :
« Lorsque j’ ai lu sur la couverture du Arch Ped Adolesc Med nov 2008 « Autism and precipitation » j’ai aussitôt pensé qu’il s’ agissait d’ un article décrivant la naïveté et l’ irresponsabilité avec laquelle certains se précipitent pour faire un diagnostic d’ autisme. Ils sont sûrs que gagner quelques semaines ou mois est essentiel et méconnaissent gravement les effets négatifs que peuvent avoir leurs tests et leur surveillance inquiète.
J’étais très content de trouver un article probablement très sérieux et très modéré mais d’ autant plus percutant.
Le titre complet de l’ article m’ a aussitôt fait déchanter « Autism Prevalence and Precipitation Rates in California Oregon and Washington Counties « il s’ agissait de voir s’ il existe un lien entre la fréquence de l’ autisme et la quantité de pluies ( les précipitations).
J’ai donc lu l’ article en le ponctuant de « ils sont complètement fous » « ils sont totalement irresponsables » et je me demandais pourquoi donc publier un tel article ? C’est alors que j’ ai remarqué qu’ était publié en même temps que cet article un éditorial dont le titre est « Autisme et précipitation : ces résultats méritaient ils d’ être publiés ? » J’ai donc lu l’ éditorial pensant y trouver une critique sérieuse de l’ article Et là encore grande déception :malgré quelques critiques l’ éditorialiste Noël S Weiss pense que cette publication est utile
Résumons ( aussi objectivement que possible) cet article : les auteurs ont comparé la fréquence de l’ autisme dans 14 états et ont constaté des différences importantes de fréquence :le taux le plus élevé était retrouvé dans le new Jersey ( second état le plus au nord des états étudiés ) et le taux le plus bas dans l’ Alabama (état le plus au sud dans l’ étude).Ils ont mis en évidence une corrélation entre l’ importance des précipitations et la fréquence de l’ autisme. Comment expliquer ce lien ? Ils proposent plusieurs hypothèses :
1Quand il pleut on est davantage à l’ intérieur de la maison et on regarde davantage la télé, or il a été démontré que la télé peut créer des troubles psychologiques il n’est pas impossible disent les auteurs qu’ elle puisse entraîner des troubles majeurs chez des enfants génétiquement prédisposés ;
2 on fabrique moins de Vitamine D or la carence en Vit D peut conduire à un taux faible dans le cerveau en croissance de calcitriol un neurostéroïde important impliqué dans le développement du cerveau Les auteurs font observer que la fréquence de l’ autisme a augmenté ces dernières années lorsque les professionnels de santé ont conseillé de limiter l’ exposition au soleil .
3 d’ autre part on est plus longuement exposé aux produits chimiques qui existent à l’ intérieur de la maison
4 il pourrait y avoir dans la haute atmosphère des polluants qui seraient ramenés vers la terre en plus grande quantité lorsqu’ il pleut beaucoup
5 la pluie peut favoriser la prolifération de mauvaises herbes et de certains insectes qui font recourir à des pesticides qui augmenteraient la fréquence de l’ autisme
Alors fallait il ou non publier cet article ?
L’ éditorialiste cite l’ article fameux de Feinstein ( science 1988 ; 242 (4883)1257-1263) ; celui ci se préoccupait des inquiétudes que pouvait susciter l’ évaluation des dangers de certaines activités de la vie quotidienne. Feinstein redoutait une « épidémie d’ appréhension » .
Cet article évoque sans aucun approfondissement sans aucune prudence les dangers de la télé et de la pluie . »ça pourrait peut être contribuer à faire apparaître un autisme chez des enfants prédisposés » laisse t il entendre et il ajoute implicitement "le soleil en excès fait du mal mais il en faut sinon c’est l’ autisme » Ce n’est pas une épidémie d’ appréhension qu’il risque de susciter mais une épidémie de terreur
 » »

Quelle relation entre l’autisme et la pluie ? A priori, la pluie "n’entraîne pas" l’autisme. Pourtant c’est ce que laisse penser cet article sérieux.

Une causalité peut se modéliser par P => Q. Une corrélation entre P et Q par l’existence d’un fait R cause à la fois de P et de Q. C’est à dire : R=> P et R => Q . Il n’y a donc pas de causalité entre P et Q. Le printemps fait pousser les bourgeons et revenir les hirondelles. On ne doit pas en déduire que ce sont les hirondelles qui font fleurir la nature, ou que les fleurs font venir les hirondelles.

Conditions d’acceptabilité d’un argument de causalité

La statistique ne peut "démontrer" que des corrélations et non des causalités. Par contre elle peut donner des arguments.

"EVENEMENTS SUIVANTS UNE VACCINATION : COINCIDENCE OU CAUSALITE ?
La mise sur le marché de vaccins contre les papillomavirus pour la prévention du cancer du col de l’utérus suggère qu’une proportion importante des adolescentes et des jeunes femmes seront vaccinées. Cette situation va poser inévitablement la question de reconnaître ce qui reviendra à une coïncidence chronologique ou à un lien de causalité dans la survenue d’évènements pathologiques, en particulier immunologiques, au décours des 3 injections vaccinales prévues.
C.A SIEGRIST et al (1) ont mis à profit une cohorte d’environ 400 000 adolescentes et jeunes femmes enregistrées jusqu’en 2005 (avant l’arrivée du vaccin) dans une banque de données Nord Américaine (Kaiser Permanente) pour calculer théoriquement le nombre de ces évènements susceptibles de se produire, spontanément, dans les jours ou les semaines suivant la vaccination. Ainsi, considérant une couverture vaccinale de 80 %, il possible de prévoir que 3 pour 100 000 adolescentes seront hospitalisées en service d’urgence pour une crise d’asthme survenue dans les 24 heures suivant une injection vaccinale.
Les auteurs soulignent la difficulté de déterminer la relation causale sur la seule base de la chronologie.
1. SIEGRIST CA et al. Human papilloma virus immunization in adolescent and young adults : a cohort study to illustrate what events might be mistaken for adverse reactions. Pediatr Infect Dis J 2007 ; 26 : 979-84. " [5]

En statistique il faut neutraliser les tiers facteurs, mais on n’est jamais sûr de connaître tous les tiers facteurs.

 En épidémiologie on estime qu’il y a causalité entre deux faits (tabagisme et cancer du poumon par exemple), si l’accroissement de l’un entraîne l’accroissement de l’autre.
 Trouver un mécanisme plausible reliant les deux faits : ci-dessus, voir les tentatives pour relier la pluie et l’autisme, sachant qu’à priori, l’autisme ne fait pas pleuvoir. [6]

Les principaux arguments en faveur d’une relation causale :
 Séquence dans le temps.
 Consistance de l’association et reproductibilité.
 Force de l’association statistique.
 Existence d’une relation dose effet.
 Cohérence avec les connaissances actuelles.
Il n’y a cependant aucune certitude. L’hypothèse peut cependant être de plus en plus crédible. C’est le cas de la relation entre le tabagisme et le cancer.

Association causale et association statistique [7]

Une étude scientifique peut suspecter une relation entre deux événements,
deux situations, deux phénomènes. Ce sont des tests statistiques appropriés
qui démontreront si cette relation est réelle ou non, c’est-à-dire si l’impression
de relation repose sur le hasard ou traduit une réalité avec un certain
degré de certitude.
Mais l’association statistique entre un phénomène A et un phénomène B ne
veut pas dire que leur relation est causale. Pour que celle-ci le soit
(probablement), il faut réunir un certain nombre de conditions
(exemple de la cigarette et du cancer du poumon) :
• Séquence temporelle : A doit précéder B ;
• Force de l’association (risque
relatif) : précision avec laquelle A permet de prédire B ;
• Spécificité de l’association : relation
exclusive entre A et B (sans faire intervenir d’autres facteurs) ;
• Gradient biologique de l’effet : B est d’autant plus important que A a été
important ou prolongé ;
• Constance de l’association et reproductibilité : diverses méthodes
et approches doivent conduire aux même conclusions ;
• Cohérence du mécanisme d’action avec les connaissances générales ;
• Preuve expérimentale : introduction ou suppression de A ;
• Parallélisme de lieu, de temps, de personnes entre A et B. ;
• Bilatéralité de la relation : l’effet de A sur B change si B change.

Les schémas de la page précédente
montrent les différentes relations
qu’on peut établir entre différents
facteurs, par exemple entre une
maladie (le cancer du poumon) et ses
causes présumées (la marque de
voiture du malade, la température
extérieure moyenne de son lieu
d’habitation, sa consommation
d’alcool, le fait que son conjoint soit
fumeur, le fait qu’il soit fumeur lui même).

D’après les résultats et les
analyses statistiques des études
épidémiologiques, et en fonction de
l’état des connaissances actuelles
(interprétation contextuelle), on peut
distinguer les catégories d’associations
suivantes :
• Il y a un lien très clair, d’ordre à la
fois statistique et causal, entre le
cancer du poumon et la cigarette, et
ce lien, au vu de l’état actuel de la
science médicale, est direct.
• De la même manière, il y a un lien
statistique et causal, mais indirect
entre le cancer pulmonaire et le
statut de fumeur passif.
• Par contre, il n’y a aucune relation,
même statistique, entre le cancer du
poumon et la marque de voiture du
patient (ce qui semble logique).
• Nous ne pouvons trouver aucune
explication à la relation statistique
avec la température extérieure ; elle
ne constitue même pas une
hypothèse de travail et il s’agit
probablement d’un pur hasard.
• Il y a une relation statistique entre
la consommation d’alcool et le
cancer du poumon. Il n’y a ici non
plus aucune explication scientifique
causale validée ou même suspectée,
mais on sait que consommations
d’alcool et de tabac sont significativement
associées (il y a plus de
buveurs parmi les fumeurs et
réciproquement que dans la
population générale). L’alcoolisme
constitue dès lors un facteur
confondant, un biais.

Argument de coïncidence

Certaines coïncidences peuvent frapper les esprits.

Argument affirmant des causes

Confusion entre les causes nécessaires et suffisantes

Énoncer une cause immédiate pour cacher la cause profonde ou inversement

suite en cours d’écriture...

http://classiques.uqac.ca/contemporains/Fainzang_sylvie/anciens_buveurs_alcoolisme/anciens_buveurs_alcoolisme.html

En particulier lorsque les facteurs explicatifs d’un événement sont nombreux. ils peuvent s’exclure, se superposer ou s’additionner

Qu’est-ce qu’une cause ? Différents types de cause.

Tout phénomène a une cause... [8]

Qu’est-ce qu’une cause ?
Cause/ facteur explicatif/raison/
Il s’agit d’expliquer l’existence d’un phénomène/événement (B).

Différents types de cause :
Il existe des causes nécessaires et des causes suffisantes
il existe des causes efficientes : immédiates ou profondes : répondent à la question parce que. Il s’agit de phénomènes qui précèdent (A).
Il existe des causes finales : but, fin... répondent à la question pour que... qui peut-être sans fin... le précédent devenant un objectif intermédiaire ou un moyen d’atteindre un but. Il s’agit des )phénomènes qui suivent (C). B est un moyen pour que C existe. J’appuie sur l’interrupteur (= A) pour allumer la lumière (= B) pour que je puisse y voir / lire....(= C)
Il existe des causes conditionnelles... B n’est possible après A que si l’ampoule n’est pas grillée...

“On a observé qu’au XVI siècle, au moyen de pouvait avoir une valeur causale (on peut considérer que l’instrument est une cause efficiente contrôlée par un agent manipulateur) et à cause de une valeur finale, pour peu que le but soit envisagé comme la cause qui déclenche une action.”

 [9]

Voir cet article sur l’efficacité du contrôle des arrêts de travail.
Voir cet article sur l’origine de la fibromyalgie
Voir cet article sur l’argumentation des expertises
Voircet article sur les causes des prescriptions hors AMM
Voir cet article sur l’imputabilité
causalité et pseudosyllogisme
article egora
Article EOLAS

Exemple du mediator

La vaccination contre l’hépatite B


[1Nous prenons aussi trop souvent nos désirs pour la réalité

[2ça commence chez le petit enfant avec la période du : « Et pourquoi… ? »

[3Notre temps octobre 2010

[4- « Médecin » Argument d’autorité.
 « J’étais réservé sur l’ostéopathie » Arguments de neutralité ou d’absence de conflit d’intérêt ou d’absence d’effet placebo
 « j’ai développé une arthrose importante du genou. » Prépare l’argument suivant.
 « Depuis que je vois un ostéopathe, je cours à nouveau 30 minutes d’affilé, je refais du vélo et je nage sans avoir besoin d’antidouleur. » Et s’il n’avait pas vu d’ostéopathe ? Vu « l’importance » de l’arthrose, il sous entend qu’il n’aurait pu faire ce type d’activité. Est-ce vrai ? L’arthrose est-elle aussi « importante » qu’il le dit ? A noter qu’il n’est pas étonnant qu’il ne souffre pas en ce qui concerne le vélo et surtout la nage..

[5Source ?

[6En effet, contrairement à la causalité, les deux termes de la corrélation sont "symétriques", et on peut parfois hésiter dans l’éventuelle causalité

[7Voir page 7 et oui de cette revue.

[8sauf pour les phénomènes relevant de la mécanique quantique

[9Grammaire méthodique du Français p 238