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Avis sur le rapport de la Cour des comptes de 2019 sur l’invalidité. [version 1]

mardi 3 décembre 2019, par omedoc

Mes commentaires du rapport de la Cour des comptes d’octobre 2019 concernant l’invalidité.

On peut trouver ce rapport ici

Commentaires sur le titre :

"Les pensions d’invalidité : une modernisation indispensable au service d’un accompagnement renforcé des assurés "

 Le terme de "modernisation" : terme piégeux.

 "Accompagnement renforcé" : quel est l’objectif de cet accompagnement renforcé ? Prévenir l’invalidité ? Diminuer le nombre de mise en invalidité ? Diminuer le coût du régime invalidité ?

Commentaire général.

Est-ce que les rédacteurs du rapport ont rencontré les médecins conseils de terrain, c’est- à dire ceux qui convoquent tous les jours des patients en arrêt de travail et qui donnent les avis sur la mise en invalidité, c’est à dire les seuls spécialistes de la question ? Je n’ai pas trouvé trace de tels contacts..

Sur le fond la Cour des comptes estime que les médecins conseils sont trop laxistes, et que les patients mis en invalidités pourraient en fait travailler.

Je doute qu’ils croient réellement que leurs recommandations puissent réellement faire diminuer le coût de l’invalidité, mais bon, il faut bien proposer quelque chose...

Quelque soit l’objectif que l’on se donne, strictement financier ou non, il faut, pour agir intelligemment, connaître les raisons de l’augmentation du coût de l’invalidité.
Et il faut avoir une vision globale des liens entre l’ invalidité, les arrêts de travail, l’âge de la retraite, le chômage...

Commentaires sur les recommandations.

L’objectif de la Cour des comptes est strictement financier ( voir ci-dessous) : il s’agit de diminuer le coût de l’invalidité.

Les mesures proposées sont simplistes : pas besoin d’avoir fait L’ENA pour recommander de diminuer le nombre d’invalides en faisant pression sur les médecins conseils pour qu’ils mettent moins de personnes en invalidité ou qu’ils suppriment l’invalidité, en poussant les invalides à reprendre un travail par des incitations financières et en luttant contre la fraude.

"14 : encourager le retour sur le marché du travail des personnes reconnues invalides les plus proches de l’emploi, en substituant aux règles de cumul en vigueur, à coût constant, un mécanisme de réduction progressive de la pension en fonction de l’augmentation des revenus professionnels, afin que tout revenu d’activité se traduise par un supplément de ressources (ministère chargé de la sécurité sociale) ;"

Incitation financière dans quel sens ? C’est pas très clair : S’agit-il de diminuer le montant de l’invalidité ou de l’augmenter ? A mon avis, si cela se traduit par une loi, celle-ci devrait entraîner en moyenne une diminution du montant de l’invalidité.

"15 : organiser un service d’une durée définie et renouvelable des pensions de 1ère catégorie en fonction de l’âge et de l’état de santé des assurés et déployer un parcours ciblé d’accompagnement vers l’emploi ; renforcer les outils permettant d’identifier les titulaires de pensions qui nécessitent un suivi particulier sur les plans médical, social et professionnel (ministère chargé de la sécurité sociale, CNAM) ;"

Là aussi la recommandation n’est pas très claire et témoigne de plus d’une mauvaise connaissance du "terrain".

Les pensions de 1° catégories ne devraient être "logiquement" attribuées qu’à des patients qui travaillent à temps partiel. En effet on ne peut vivre avec une cat 1. Il est donc absurde d’évoquer un accompagnement à l’emploi : ils ont déjà un emploi.
Il est déjà prévu qu’en fonction du type de maladie invalidante et de l’âge le patient soit reconvoqué pour révision de l’invalidité. Et celle-ci ne peut être en fait supprimée que si la personne a pu reprendre le travail à temps complet. Sinon pour supprimer une invalidité il faut démontrer une amélioration sur le plan médical par rapport à l’examen initial.

Quel "service particulier" sur le plan médical est-il évoqué ? Je ne vois pas comment c’est possible puisqu’il est interdit au médecin conseil de faire du suivi médical ?

Ne s ’agit-il pas en fait de faire pression sur les invalides et les médecins conseils : ceci est sous entendu par les termes que j’ai souligné :

"Au terme de cette période, le bénéfice de la pension serait réévalué par le service médical de l’assurance maladie, à l’aide d’un référentiel médico-professionnel, afin d’apprécier s’il convient de reconduire la pension, de la suspendre ou de faire changer de catégorie l’assuré concerné. [...]. Ce suivi ciblé d’une partie des pensionnés de 1ère catégorie concourrait à une meilleure maîtrise des admissions et maintiens en invalidité et des dépenses qui leur sont associées"

"16 :doter l’évaluation de l’état d’invalidité d’un référentiel national opposable aux échelons locaux du service médical et ouvrir une réflexion sur une évaluation de l’invalidité et du handicap à partir d’un référentiel commun (ministère chargé de la santé, CNAM) ; "

Il y a très longtemps que je demande un référentiel national. J’ai même fait il y a longtemps un article sur le sujet. Cependant le rêve des administratifs c’est un référentiel ou il n’y ait que des cases à cocher et à la fin la décision qui tombe. La Cour des comptes se fait beaucoup d’illusion sur la possibilité de quantifier l’évaluation de la capacité de travail.
Le sous entendu de cette recommandation c’est en fait que les médecins conseils sont trop laxistes [1]et que yaka répondre par oui ou par non à des questions...

Qui va établir ce référentiel ? Comment va-t-il être établi ?

"17 : approfondir la rénovation et la mutualisation de la gestion du risque et mettre en œuvre une vérification automatisée systématique des revenus professionnels ou des ressources déclarées par les titulaires de pensions d’invalidité et de l’ASI à partir des données intégrées à la base des ressources mensuelles des organismes sociaux (CNAM)."

Recommandation strictement administrative. Difficile d’être en désaccord avec la lutte contre la fraude. Mais bon rien d’innovant.

Conclusion

Cour des comptes : des poncifs et toujours les mêmes recettes.


[1D’où l’opposabilité