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Analyse linguistique : "oui mais..." [version 0.00]

mercredi 10 février 2010, par omedoc

En cours d’écriture...

Réservé aux médecins

Un signe objectif de somatisation ?

J’ai remarqué chez les patients souffrant de troubles somatoformes ( fibromyalgiques en particulier) qu’ils ne peuvent laisser penser qu’ils ne seraient pas
aussi malade qu’ils le disent (= au niveau de la plainte), et/ou qu’ils pourraient faire des efforts physiques et/ou que leur santé puisse un peu s’améliorer....

Un des signes de cette discordance est sur le plan linguistique le
"oui.. mais.."

"Oui je marche (comme le médecin me l’a demandé) mais en arrivant il faut que je prenne du F. (= un antiinflammatoire)."

"Oui le traitement me fait du bien _mais_ j’ai toujours de grosses crises...."

"Oui il y a a amélioration, à condition de ne pas faire d’effort."

"Mais" ou équivalent...

Ce connecteur consiste principalement à exprimer "a denial of expectation".
De p on pourrait conclure r , mais c’est en réalité q qui est vrai.
"Mais" vient annuler une inférence que l’on pourrait tirer de p en vertu
de quelque topos (c’est à dire une proposition implicite inscrite dans
le sens que le malade donne à sa maladie)

p = Oui je marche comme le médecin me l’a demandé,
=> On pourrait en déduire que je ne suis pas si malade que ça puisque
j’arrive à marcher = r
mais après il faut que je prenne un antiinflammatoire...
=> en réalité je le paye (souvent exprimé ainsi d’ailleurs) = je suis
vraiment (et définitivement) malade et il n’y a pas d’amélioration = q

Inspiré et librement adapté du livre : "l’énonciation" de kerbrat-orecchioni.

"Nous considèrerons comme faits énonciatifs les traces linguistiques de
la présence du locuteur au sein de son énoncé, les lieux d’inscription
et les modalités d’existence de la subjectivité dans le langage."

je pense qu’on pourrait tirer beaucoup de chose d’une analyse
linguistique des paroles des patients..

L’analyse linguistique du discours du patient est en fait la seule
possibilité qui nous est donné d’objectiver la subjectivité du patient.

D’où mon autre tentative d’analyse du discours de la demande..
A travers l’étude de l’énonciation ne pourrait-on
deviner les attentes plus ou moins cachées du patient par rapport à son médecin.

On peut valider cette hypothèse en prenant par exemple 30 malades avec Troubles Somatoformes et 30 malades avec pathologie organique, et on étudie dans chaque cas les occurrences du "oui mais"à des questions sur l’utilité d’un traitement,
sur l’existence d’une amélioration ou sur l’existence d’une possibilité
de faire telle ou telle chose malgré la douleur et/ou la fatigue et/ou
le handicap.
Il faut une question médicale déclenchant un "oui". Ceci permet d’éliminer les pessimistes (si ça existe) qui disent oui mais à tout., même à ce qui ne les concerne pas directement.

D’un médecin :

effectivement, je pense que nous connaissons tous des patients tellement accrochés à leurs symptômes que le seul plaisir de leur vie semble être de nous démontrer que nos thérapeutiques ne servent à rien.

De mon côté, je prends un malin plaisir à leur faire remarquer que lorsqu’il y a une amélioration, ils la passent sous silence. Il faut vraiment insister pour entendre "oui, oui, pour le coude c’est passé" ( epicondylite dont ils se plaignaient depuis des mois, et dont ils ne mentionnent même pas la guérison, tentant d’insinuer qu’on s’intéresse vraiment à de l’histoire ancienne au lieu de la nouvelle crise grave qui se profile)

D’un autre médecin :

Dans le cadre de certaines psychothérapies ce "oui mais " des patients est bien connu. A. C. s’il suit ces échanges nous en dira plus : il m’expliquait que pour ces patients qui on toujours ce "oui mais" si pénible, il est utile d’avoir un "oui mais d’avance"...

Dans l’exemple du patient d’A : "oui je marche.....mais c’est parce que je prends des anti inflammatoires" , on peut répondre "oui, vous prenez des anti inflammatoires...mais vous les supportez bien", ce à quoi il nous répondra "oui, je les supporte bien..... mais c’est parce que je prends de l’OMEPRAZOLE" ce à quoi vous pouvez répondre "oui, vous prenez l’oméprazole....mais vous le supportez bien aussi"....etc.....

Il parait que cela permet de mieux gérer la situation du patient.