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Le stress au travail : [version 0.10 du 08/12/2009]

mardi 1er décembre 2009, par omedoc

 Synthèse d’une intervention de C.Dejours, médecin spécialiste de la psychodynamique du travail, à un congrès sur stress au travail

 Intervention d’un médecin conseil à une Journée organisée par le Comité Départemental d ?Education pour la Santé

synthèse d’une intervention de C.Dejours, médecin spécialiste de la psychodynamique du travail, à un congrès sur stress au travail

Travail et maladies psycho somatiques

Alors qu ?il existe des maladies somatiques spécifiques du travail, comme l ?asbestose, la silicose, le saturnisme, il n ?existe pas de maladies mentales spécifiques du travail.
Mais il existe par contre des stratégies collectives très riches de défense et spécifiques aux différents métiers [1]
Les contraintes de travail peuvent avoir un impact sur la santé que le travailleur va commencer par compenser puis lorsqu ?il n ?y arrive plus surviennent la souffrance puis la décompensation

Quelles sont ces contraintes ?

 contraintes physiques (postures,gestes répétés ?), chimiques (produits toxiques ?), biologiques (manipulations de produits sanguins ?) : : celles-ci peuvent avoir un impact sur le corps et entraîner des maladies physiques
 contraintes d ?organisation du travail :
les nouvelles organisations du travail comme la division des tâches, les procédures les règles à respecter mais aussi le contrôle de l ?exécution des ordres peuvent déclencher des maladies mentales.
Toute étude de la santé mentale au travail renvoie donc à l ?étude de l ?organisation de ce travail.

Les maladies mentales en relation avec le travail augmentent sans cesse ; elles représentent en 2008, 3 à 6% du PIB. Ce sont :
 les pathologies de surcharge : burn out (épuisement professionnel), karochi (AVC soudain chez un patient jeune sans facteur de risque) et TMS (500 000 personnes atteintes malgré la robotisation, l ?automatisation du travail, elles ne font qu ?augmenter)
 les pathologies post traumatiques : violence sur personne, agression, hold up ; fréquent chez vendeurs, policiers, personnel d ?accueil
 les pathologies du harcèlement moral : le harcèlement existe depuis toujours (serfs, galériens, ouvriers au XIX ème siècle..) ; mais pourquoi les gens tombent ils plus malades qu ?avant ?
Les suicides sur le lieu de travail sont un phénomène nouveau (jamais avant 1995) par rupture probable du lien social, de la convivialité.

Les années 2000 ont vu apparaître une nouvelle organisation du travail : évaluation individualisée des performances et contraintes de qualité totale

  • L ?évaluation individualisée des performances est critiquable telle qu ?elle est actuellement mesurée car ses bases scientifiques de mesure sont fausses.
    En effet, l ?essentiel du travail fait par quelqu ?un est subjectif : souvent quand on travaille on se heurte à l ?échec ; si tout était simple, les machines le feraient ; c ?est la notion de savoir faire qui prime et de résistance du monde à la maîtrise technique.
    Ex : malgré les soins des infirmiers, des malades meurent ; malgré les ingénieurs et les mesures préventives, on peut avoir un accident nucléaire dans une centrale
    Le travailleur doit donc apprendre à endurer l ?imprévisible, l ?échec, le découragement voire l ?impuissance ; cet apprentissage prend du temps et est subjectif ; d ?ailleurs cela parasite souvent sa vie extérieure.
    Tout ce qui est subjectif est invisible donc ne se mesure pas ; on ne peut donc mesurer le travail accompli chaque jour et l ?investissement qui y est consacré. ; au mieux on mesure les résultats du travail mais qui ne traduisent pas ce que la personne fait et vit effectivement chaque jour.
    De plus une place démesurée est consacrée à l ?évaluation individuelle et cela nuit au collectif donc dégrade les relations entre personnes.
    Si en plus il y a des menaces de licenciement, de restructuration les conduites immorales apparaissent : concurrence déloyale, rétention d ?infos, perte de confiance ; c ?est « la guerre » économique à petite échelle.
    Il y a effondrement de la solidarité, disparition de la prévenance à l ?égard d ?autrui donc solitude voir « désolation » (perdre pied au sens propre du terme)
    En cas de harcèlement personne ne bouge ; pas de témoignage
    Les plus vulnérables au harcèlement sont souvent les plus motivés par leur travail ; si on les attaque ils pensent à tort qu ?ils ont fauté.
  • Le concept de qualité totale est un contresens théorique ; elle n ?existe pas et ça ne marche pas ; pour l ?atteindre, les gens développent des stratégies de « fraude », de mensonge et cela alourdit leur quantité de travail ;

Quelles actions ?

Une action rationnelle devrait viser la transformation de l ?organisation du travail ; [2]
Les organisations syndicales ont perdu de leur puissance et donc de leur efficacité ; avec qui peuvent dès lors se faire les négociations ?

Quelles sont les solutions ?<br>

La clé ne peut pas venir d’en haut, car tout le monde est sous pression, et, dans ce phénomène de cascade, il n’est pas facile de calmer le stress. L’une des voies consiste à s’appuyer sur la capacité des gens à reprendre la parole pour améliorer le "vivre ensemble". Savoir se dire ce qui rend la vie impossible, faire remonter les suggestions, avoir la volonté de se poser pour réfléchir, dialoguer avec l’autre. Le plus difficile pour l’encadrement, c’est d’écouter, et ensuite de le traduire en termes de management.

Est on capable de le mettre en oeuvre ?<br>

Nous souffrons beaucoup du court-termisme des dirigeants. Economistes et politiques exaltent le système qui consiste à ramasser le maximum d’argent dans un minimum de temps. Or ces bénéfices sont de plus en plus déconnectés du travail. Le "vivre ensemble" n’est pas rentable immédiatement, mais il est fondamental pour la pérennité du système. En tout état de cause, on ne laisse pas des gens mourir à cause du travail. On ne peut pas accepter qu’au nom de l’efficacité économique on casse notre société en mettant les gens sur le bord de la route. Cette violence générée par une mauvaise organisation du travail, c’est la société qui doit ensuite l’assumer en termes de dégâts sociaux et financiers. On ne peut pas constamment pomper le capital humain et l’intelligence collective sans se préoccuper des conséquences. Parce qu’au bout d’un moment, il n’y aura plus rien à pomper, nous aurons une société invivable, et le système économique ne fonctionnera plus. On a peut-être déjà atteint ces limites.

Intervention d’un médecin conseil à une Journée organisée par le Comité Départemental d ?Education pour la Santé

 Quelque soient les entreprises et ce qu ?elles fabriquent, que ce soit du bien ou du service, on assiste à une augmentation de ce phénomène
 Le stress existe à chaque étage professionnel de l ?employé de base au directeur, chacun étant soumis à des contraintes de résultats
 Le stress est probablement favorisé par une organisation nouvelle du travail dans chaque entreprise quelque soit sa taille :

 La structure de l ?emploi en Europe a totalement changé en 60 ans : en 1950, l ?agriculture représentait 30% des emplois ; elle n ?est plus que de 3% en 2008. Le secteur industriel qui représentait 33 % des emplois en 1950 n ?en représente plus que 22%. Le secteur tertiaire (éducation, santé social, administrations, commerce, banques, tourisme ?) a quant à lui explosé passant de 37% des emplois an 1950 à 75 % en 2008. On est passé en quelques décennies de l ?ère ancestrale de la charrue à celle de l ?ordinateur et des nouvelles technologies .

 Aménagement et réduction du temps de travail : les personnels travaillent 35 heures mais effectuent le plus souvent le même travail qu ?ils faisaient en 39h ; cette diminution s ?est souvent faite au détriment des pauses et des relations interpersonnelles qui permettaient de créer des liens, une solidarité interpersonnelle et des espaces de décompression.
Les employés, par manque de temps, communiquent par mels, par cahier de liaison et se parlent de moins en moins.
Il existe bien des réunions de travail, pour lesquelles la plupart des employés se plaignent d ?ailleurs du nombre excessif, mais ces réunions de travail concernent l ?atteinte des objectifs de rentabilité mais jamais les problématiques interpersonnelles.

 Le management par des objectifs de rentabilité est une des caractéristiques des nouvelles formes d ?organisation du travail ; il définit ce que l ?entreprise attend des salariés et fixe ainsi les critères sur lesquels le travail sera évalué : chacun à chaque niveau de l ?entreprise est soumis à une évaluation annuelle de son travail, à des indicateurs de performance et d ?efficacité ; ces objectifs prennent en compte des résultats quantitatifs et ne mesurent pas la qualité intrinsèque du travail.
Le concept de « belle ouvrage », cher au c ?ur des travailleurs consciencieux est peu pris en compte ; dans la relation avec le client, par exemple, la qualité de cette relation (service rendu) souvent dépendante de la personnalité de l ?employé est ignorée voire blâmée car elle nécessite du temps ; en effet,cette quantité de temps peut être excessive par rapport à celle demandée par la hiérarchie pour traiter le dossier d ?un client.(rendement).
A contrario, le client , autrefois acheteur passif ou usager sommé de se plier aux exigences du service public auquel il s ?adressait, est désormais un individu doté de droits et d ?attente vis-à-vis de celui qui le sert.
Nombre d ?employés travaillant à interagir avec ce client d ?un nouveau genre, se voient obligé pour garder un sens à leur travail, à diverses stratégies d ?échappement au contrôle de rentabilité de l employeur mais aussi à la servitude qui les guette avec ces nouveaux clients exigeants.

 Paradoxalement les procédures qualité qui aboutissent à la certification,mesurent la qualité du produit ou du service fabriqué par le respect des « process » mis en place mais ne mesurent pas les relations humaines au sein de l ?entreprise qui sont le baromètre social de celle-ci.

 Les évaluations du travail accompli sont faites par des managers qui souvent méconnaissent le travail réellement effectué par l ?employé ; ces managers antérieurement formés sur le tas ou issus eux même de la base, proviennent maintenant d ?autres entreprises, ils resteront quelques années dans l ?entreprise, le temps de changer les processus avant de repartir vers d ?autres métiers.

Du fait de l ?individualisation des objectifs, la solidarité entre collègues s ?émousse ; les syndicats sont moins présents parfois inexistants et nombre de places de délégués du personnel sont vacantes.

Peut s ?en suivre du fait de la souffrance et du non dit des employés, l ?apparition de symptômes psychologiques (syndromes anxio dépressifs ?) ou physiques (TMS, lombalgies, fibromyalgie ?).
Les arrêts de travail se multiplient ; on peut assister à une mise en retrait des personnes, une perte du sens du travail, puis de l ?estime de soi voire un suicide dans les cas extrêmes.

Comment remédier à ce phénomène croissant dans tous les pays industrialisés ?

 Une prise en charge individuelle est nécessaire mais loin d ?être suffisante ; elle peut passer par des techniques de relaxation, de yoga de coatching ?
 si l ?on s ?arrêtait à celle-ci, on ne solutionnerait pas le problème global et croissant du stress au travail et l ?entreprise au sens large du terme pourrait se sentir dédouanée de la réflexion à mener pour améliorer son fonctionnement.

L ?ARACT propose ses services aux entreprises à la demande des CHSCT ou de l ?Etat si elle a été alertée de dysfonctionnements. Elle aide les entreprises à poser ce diagnostic. A cet effet un guide méthodologique sera prochainement en ligne sur son site Internet.

Trac syndical

Tract syndical nov 2009

Parlons de la souffrance au travail :

Pour le SNPDOS-CFDT, la santé au travail est un droit fondamental.

La dégradation croissante des conditions de travail fait apparaître de nouveaux risques pour la santé. Ces risques concernent un ensemble de troubles : stress, violence, épuisement professionnel, harcèlement ...

Dans nos organismes, nous n ?échappons pas à ces risques. Que constatons-nous ?

> les changements organisationnels incessants, les incertitudes conjoncturelles, les mutualisations excessives, la réduction abusive d ?effectifs, l ?organisation matricielle du travail avec double hiérarchie (verticale et par pôle), l ?individualisation accrue des rémunérations.

> la sous utilisation de compétences, la surcharge de travail, les priorités multiples et intercurrentes, les injonctions paradoxales, l ?exigence de la qualité de la forme au dépends de la qualité du fond qui est à l ?origine de la perte de sens de nos métiers, la pression dans les délais et les objectifs en l ?absence de moyens, la dépersonnalisation des directives continuelles reçues par email, le sentiment de responsabilités grandissantes dans le travail surtout en cas de problèmes, la hiérarchie omniprésente dans le contrôle mais absente en cas de difficultés.

> un manque de reconnaissance, de considération dans un climat de course aux « indicateurs », de prégnance des reporting et de relations tendues avec la hiérarchie pressée, elle aussi, par des délais.

Certains de nos collègues praticiens conseils culpabilisés ressentent une véritable souffrance. Le SNPDOS-CFDT les accompagne dans une démarche de récupération de la confiance en eux et de normalisation des rapports avec l ?employeur.

Les militants SNPDOS-CFDT revendiquent la création de commissions de suivi des conditions de travail pour les praticiens conseil qui n ?ont, en général, pas de CHSCT.

Nous alerterons le conseil sur ces questions et rappellerons aux directions leurs obligations de résultats en la matière.

LaNutrition.fr, le 08/12/2009

Les hommes qui fuient un conflit avec leur patron ont trois fois plus de risque de faire une crise cardiaque, et même d ?en mourir, que ceux qui préfèrent y faire face, selon une récente étude suédoise.

Pour protéger son c ?ur, mieux vaut oser parler à son supérieur que de se taire. C ?est ce qui ressort d ?une étude suédoise, menée dans différents milieux professionnels auprès de 2755 hommes âgés de 41 ans en moyenne.

Pendant dix ans, les participants ont répondu à des questionnaires destinés à évaluer leurs réactions lorsque des situations conflictuelles au travail se présentaient. L ?analyse des réponses des volontaires montrent que ceux qui se taisent ont trois plus de risque de faire une attaque cardiaque que ceux qui affrontent la situation.

Et lorsque le conflit survient entre collègues ? C ?est bien pire. L ?étude montre en effet que le risque de crise cardiaque est multiplié par 4 chez ceux qui ont tendance à fuir la situation.

Leineweber C, Westerlund H, Theorell T, Kivimäki M, Westerholm P, Alfredsson L. Covert coping with unfair treatment at work and risk of incident myocardial infarction and cardiac death among men : Prospective cohort study. Journal of Epidemiology and Community Health. 2009 Nov 24.


[1quelles sont elles ?

[2comment amender ces méthodes d ?évaluation ? qu ?est ce qu ?une bonne évaluation ?