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Menacer les fraudeurs. Effets pervers. Importance des problèmes.[version 0.00 du 05/07/2008]
samedi 5 juillet 2008, par
Extrait du canard Enchaîné du 25/06/2008 :
« Pierre, qui vit à Paris, a réussi l’exploit de ne pas prendre un seul jour d’arrêt maladie en vingt-cinq ans de carrière. Ce qui n’a pas empêché la sécurité sociale de lui adresser un avertissement aussi au ton peu amène, menaçant de le priver de 50% de ses indemnités parce qu’il avait posté son (premier) arrêt de travail avec vingt-quatre heures de retard.
Or ce malheureux venait d’être opéré dans une clinique et se trouvait dans l’incapacité de quitter sa chambre. Il faut croire que les ordinateurs de la Sécu ne savent pas faire la différence entre une simple grippe et un séjour en milieu hospitalier.... »
Voici le type de courrier correspondant à une histoire similaire.
« Date 28/06/2008
Objet Application de l’article R 321-2 du code de la Sécurité Sociale.
»
« Madame,
En date du 14/05/2007 vous avez adressé avec plus de 48 heures de retard un avis d’arrêt de travail prescrit le 13/03/2007.
Vous avez récidivé en nous adressant le 10/05/2008 une prolongation du 15/01/2008. Nous sommes dans l’obligation d’appliquer les sanctions prévues par l’article R 321-2 du code de la Sécurité Sociale.
Les indemnités journalières du 25/02/2008 au 31/05/2008 seront réduites de 50%.
Toutefois, si vous souhaitez contester cette décision.... et de toute pièce utiles à l’instruction de votre dossier »
(Signé :) « Votre conseiller Assurance Maladie
»
« Copie adressée à votre employeur ce jour. »
Remarques
Ce courrier est choquant, pourtant il ne semble pas choquer les responsables. Pour moi c’est une grave erreur. Pour d’autres non. Pourquoi ?
1° Dans X% des cas il y a une bonne raison médicale au retard. Ce courrier stigmatise des personnes en général fragiles socialement et psychologiquement. Les conséquences psychologiques sont minimisées [1]. Les conséquences financières et sociales d’une réduction de 50% du paiement (La personne va donc toucher en fait un quart de son revenu) sont considérées comme un détail.
2° Les conséquences par rapport à l’image donnée par la Sécu sont minimisée, alors qu’en plus, dans le second cas, c’est la sécu qui avait perdu le dossier ! Et alors qu’il existe souvent/parfois des retards dans le paiement des IJ du fait de la sécu : ce qui est autrement plus graves. les malades restent un deux ou trois mois sans revenus !
3° La priorité étant à la chasse au fraudeur, les effets secondaires sont déniés : injustices, souffrances psychologiques et sociales. Tout ceci développe un manque d’attention, un manque de précaution, et une insensibilité morale.
On peut faire des erreurs, et même on doit agir au risque de faire des erreurs car c’est même en faisant des erreurs qu’on progresse. Mais :
– Il faut savoir les reconnaître et bien mesurer leur gravité
– Notre responsabilité est de les éviter lorsqu’elles étaient, avec un peu de réflexion, évitables.
On peut se poser la question de la légalité de la copie de ce courrier à l’employeur ?
Il est étonnant que la signature soit celle d’un "Conseiller".
Un simple contact avec le médecin traitant aurait peut être permis d’éviter toute cette procédure coûteuse.
Ce n’est pas le premier exemple de courrier adressé de façon automatique et posant le même type de problème.
Avant d’appliquer les sanctions (sans prévenir) un courrier demandant des explications auraient au moins pu être envoyés. Ici, comme dans les autres administrations on sanctionne d’abord, et on propose de s’expliquer ensuite.
Toute perte de revenu, même minime et temporaire, chez des travailleurs pauvres est une catastrophe. Il semble que prévenir ce risque soit le dernier des soucis des dirigeants : cet objectif n’est pas pris en compte et donc aucune évaluation des dégâts engendrés n’est faite.
[1] Dans le second cas il s’agissait d’une personne souffrant de Psychose Maniaco Dépressive