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Philosophie, littérature et maladie [Version 0.02]

mercredi 23 septembre 2009, par omedoc

Thérèse d’Avila.


Moi qui suis malade, j’ai été toujours ligotée, incapable de rien, jusqu’au jour où je me suis décidée à ne plus me soucier de mon corps ni de ma santé ;[...]depuis que je suis moins attentive à me soigner et à me dorloter, ma santé est bien meilleure.”
 [1]

Alain

Beaucoup de chapitres concernant la maladie dans le livre "propos sur le
bonheur" d’Alain, téléchargeableici

Pour comprendre : Alain explique que la tendance du
patient est d’entretenir et de majorer (à ses yeux) ses symptômes par imagination. , passion, manque de raison, manque de savoir faire.., et le rôle du médecin est au contraire de "minimiser", banaliser, relativiser, recadrer, donc au fond démédicaliser pour lutter contre cette tendance.

Extraits choisis :

"Les mauvais médecins seraient donc ceux qu’on aime assez pour vouloir les
intéresser à ses propres maux ; et les bons médecins sont ceux au contraire
qui vous demandent selon l’usage : « Comment allez-vous ? » et qui n’écoutent
pas la réponse."

Si vous voulez comment savoir il en arrive là lire le chapitre : "crainte est
maladie"

A méditer pour nous :

"On devrait bien enseigner aux enfants l’art d’être heureux. Non pas l’art
d’être heureux quand le malheur vous tombe sur la tête ; je laisse cela aux
stoïciens ; mais l’art d’être heureux quand les circonstances sont passables
et que toute l’amertume de la vie se réduit à de petits ennuis et à de petits
malaises.

La première règle serait de ne jamais parler aux autres de ses propres
malheurs, présents ou passés. On devrait tenir pour une impolitesse de
décrire aux autres un mal de tête, une nausée, une aigreur, une colique,
quand même ce serait en termes choisis. De même pour les injustices et pour
les mécomp­tes. Il faudrait expliquer aux enfants et aux jeunes gens, aux
hommes aussi, quelque chose qu’ils oublient trop, il me semble, c’est que les
plaintes sur soi ne peuvent qu’attrister les autres, c’est-à-dire en fin de
compte leur déplaire, même s’ils cherchent de telles confidences, même s’ils
semblent se plaire à consoler. Car la tristesse est comme un poison ; on peut
l’aimer, mais non s’en trouver bien ; et c’est toujours le plus profond
sentiment qui a raison à la fin. Chacun cherche à vivre, et non à mourir ; et
cherche ceux qui vivent, j’entends ceux qui se disent contents, qui se
montrent contents. Quelle chose merveil­leuse serait la société des hommes,
si chacun mettait de son bois au feu, au lieu de pleurnicher sur des
cendres !"

Chapitre l’art d’être heureux

Traitement de la toux...

"Pour la toux, dans le rhume, il existe une discipline [..] trop peu
pratiquée. La plupart des gens toussent comme ils se grattent, avec une
espèce de fureur dont ils sont les victimes. De là des crises qui fatiguent
et irritent. Contre quoi les médecins ont trouvé des les pastilles, dont je
crois bien que l’action principale est de nous donner à avaler. Avaler est
une puissante réaction, moins volontaire encore que la toux, encore plus au
dessous de nos prises. Cette convulsion d’avaler rend impossible cette autre
convulsion qui nous fait tousser. C’est toujours retourner le nourrisson. Moi
je crois que si l’on arrêtait au premier moment ce qu’il y a de tragédie dans
la toux, on se passerait de pastilles. Si, sans opinion aucune, l’on restait
souple et imperturbable au commencement, la première irritation serait
bientôt passée."

je confirme....

Pour Alain toute dépression est maladie organique car liée à notre nature humaine qui n’est fait que de matière, Il faut donc supporter la tristesse comme on supporte le mal au ventre. C’est la mauvaise "gestion" de cette sensation/humeur qui aggrave et
en fait une vraie maladie (car envahissant la conscience). Ce n’est pas la maladie qui rend malade, c’est nous qui nous rendons malade.

"Considérons pourtant les malades que l’on appelle mélancoliques ; nous
verrons qu’ils savent trouver en n’importe quelle pensée des raisons d’être
tristes ; toute parole les blesse ; si vous les plaignez, ils se sentent
humiliés et malheureux sans remède ; si vous ne les plaignez pas, ils se
disent qu’ils n’ont plus d’amis et qu’ils sont seuls au monde. Ainsi cette
agitation des pensées ne sert qu’à rappeler leur attention sur l’état
désagréable où la maladie les tient ; et, dans le moment où ils argumentent
contre eux-mêmes, et sont écrasés par les raisons qu’ils croient avoir d’être
tristes, ils ne font que remâcher leur tristesse en vrais gourmets. Or, les
mélancoliques nous offrent une image grossie de tout homme affligé. Ce qui
est évident chez eux, que leur tristesse est maladie, doit être vrai chez
tous ; l’exaspération des peines vient sans doute de tous les raisonnements
que nous y mettons, et par lesquels nous nous tâtons, en quelque sorte, à
l’endroit sensible.

De cette espèce de folie, qui porte les passions jusqu’à la rage, on peut se
délivrer en se disant, justement, que tristesse n’est que maladie, et doit
être supportée comme maladie, sans tant de raisonnements et de raisons. Par
là on disperse le cortège des discours acides ; on prend son chagrin comme un
mal de ventre ;"

Sénèque

Apprendre à vivre, Tome II, Lettre à Lucilius

Catherine Mansfield

Colette

F. Dostoïevsky

Les Carnets du sous-sol

Elisabeth Gilles

Le crabe sur la banquette arrière

F. Nietzsche

Esprit de contradiction, fredaines, méfiance joyeuse, raillerie sont signes de santé ; toute forme d’absolu relève de la pathologie.

Citations diverses

mais qu’est-ce que la santé, me direz-vous ?
Paul valéry : le silence des organes
Georges Peros : la santé c’est ce qui sert à ne pas mourir chaque fois qu’on est gravement malade,
Henri Sigerist : une attitude joyeuse envers la vie, une acceptation réjouie des responsabilités que la vie impose à l’individu
Canguillem : la santé est la marge de tolérance aux infidélités du milieu, donc en gros la capacité d’adaptation dans la majorité des situations.
OMS état de complet bien être physique mental et social qui ne consiste pas seulement en une absence de maladie.
Un état précaire qui ne présage rien de bon. Knock

Montaigne

Montaigne n’aimait pas beaucoup les médecins

il les craignait car, d’après son expérience personnelle la santé empirait après la venue du praticien. Les médecins ne vivaient d’ailleurs ni plus heureux ni plus longtemps que leurs patients, "et à dire vrai, de toute cette diversité et confusion d’ordonnances, quelle autre fin et effet après tout y a -t-il que décider le ventre ? Ce que mille simples domestiques peuvent faire". ..... (Skrabanek)


Source audio : Philippe Meyer. émission je vous le chanterai...


[1Livre de la vie chap XIII §7